1. La musique avant tout : une des pochettes qui me font les plus regretter le vinyl et les années 70-80. Purement esthétique. 2. Narcisse et Goldmund : hésiter entre la rigueur et l’appel de la création. Toujours. 3. … et l’appel du dehors. Aussi souvent que possible. 4. Dans la poche, en permanence : un médiator, un Ganesh – le trublion – pour la vigilance. 5. Le travail du bois, comme un contact charnel et l’idée d’un métier qui aurait pu être manuel. 6. Le surf et la beauté sauvage des vagues. Les landes, au moins une fois par an. Le bruit sourd d’un glissando en apesanteur. 7. Drift, The Apartments : l’album que j’ai probablement le plus écouté avec The Fugitive Kind des Swans Way, Baby, The Stars Shine Bright des Everything But the Girl et Pacific Street des Pale Fountains. L’album du retour et de la solitude. Mon album préféré de The Apartments reste All You Wanted – un trajet Montpellier/Genève pour l’acheter en Vinyl (une autre époque !) – mais Drift m’a suivi si longtemps… 8. Le chapeau de mon grand père : une idée de la famille et une pensée pour mon épouse. 9. Les amis, les apéros entre amis et l’essuie-main à l’espagnole qui va avec. 10. Une matrice de police en plomb pour une longue tradition familiale autour de l’imprimerie, la typographie, le journalisme. 11. Mon outil de travail quotidien. 12. Une belle chimère : mi-faire-part de bonne année (l’annonce d’un renouveau), mi-renouveau (l’annonce de quelques bonnes années). Et surtout de belles rencontres. 13. (hors cadre) Photo de mon mariage.
Amateur de musique sans jamais en avoir pratiqué, ma vie tourne et a beaucoup tourné autour d’elle. Entre albums incontournables et concerts mythiques, impossible de mettre mes essentiels musicaux tant ils sont nombreux.
First of All : au centre, la Famille.
Des Vinyles et des CD : une fois encore pas vraiment d’essentiels tant ma consommation est gargantuesque, une folle envie de découverte mais aussi une fidélité à certains sons : la basse des Cure, les guitares de l’indie pop made in UK des Smiths à Blur, les synthés de Depeche Mode ou de New Order, les voix féminines de Bjork à PJ Harvey en passant par The Sundays, les amis de 49 Swimming Pools ou Autour de Lucie, les mix de DJ Shadow, la brutalité d’un Trent Reznor, les univers de Joy Division ou des Cocteau Twins.
Des places de concerts et des Pass festival : Ma culture musicale c’est beaucoup construite dans les concerts, des découvertes, des confirmations mais aussi quelques déceptions, avec une tendresse particulière aux Black Session de Bernard Lenoir ou au Festival des Inrocks qui m’ont beaucoup « ouvert les oreilles ».
Un éco cup ASSE, car c’est l’ustensile le plus important en festival et que je suis stéphanois et donc lié pour toujours à mon club de foot de cœur l’ASSE.
Quelques Vedett, ma « pills » préféré, car je suis arrivé il y a plus de 10 ans dans le Nord et que je m’y sens bien, j’en ai adopté les us et coutumes. Une belle région à la situation géographique idéale me concernant car à un jet de pierre de Bruxelles, Londres et Paris mais surtout qui m’a accueilli à bras ouverts.
UnIpod car mon écoute de la musique a aussi changé… et même si j’ai toujours besoin d’un support le Vinyle ou le CD, encore une fois pour sa pochette mais aussi ses crédits, j’aime avoir du son avec moi.
Mon smartphone, car connecté en permanence, pour la famille, les amis, les infos, pour le boulot, … pour avoir l’impression de ne rien manquer.
Quelques magazines, anciens fanzines, les Inrocks (idéalement version mensuelle), Magic ! , New Comer, car je fais partie de la génération qui lisait, qui écoutait la radio et qui scrutait les notes des pochettes d’albums pour découvrir les filiations, les ramifications… La génération « single club », Rough Trade rue de Charonne, celle de l’avant internet. (J’aurais dû ajouter un NME et un Melody Maker). Magic Mushroom et les Inrockuptibles plus spécifiquement pour les rencontres, l’international indie pop, les passionnés, les moments vécus… Manu, JD, Christophe, Philippe,…
Et des livres : Photos, Street Art, Paysage car j’ai toujours pensé la culture comme un tout. Sensible à l’esthétisme qui véhicule autant d’émotion que la musique, avec un attrait particulier pour la photo noir et blanc et un intérêt pour le graphisme et les logos.
Quelques marottes : les labels 4AD, Sarah Records et Mute pour l’ensemble de leur œuvre, aussi bien sonore que graphique, j’aurai pu y ajouter Factory, Mo Wax, Heavenly records ou Warp, car je suis aussi sensible au visuel, à l’esthétisme d’une pochette qu’à la musique. Oliver Vaughan, Peter Saville ou Futura m’ont autant fait acheter d’album que les grands passeurs comme Bernard Lenoir. Que serait Endtroducing de DJ Shadow, This Mortal Coil, Doolittle des Pixies ou Mouvement de New Order, sans leurs pochettes. C’est quand même, Oliver Vaughan (V23) qui m’a le plus marqué par son univers global autour de 4AD faisant de ce label, un objet de quasi culte me concernant.
Pour terminer : Mes polos Fred Perry et des Skate Shoes, parce que chacun a son uniforme, et c’est celui dans lequel je me sens bien. Une brosse à barbe, parce que je suis barbu.
Sur son nouveau single, le songwriter belge, Thomas Jean Henri, nous invite à partager une nouvelle fois, l’hospitalité de Cabane. En compagnie d’ami(e)s chers, il entretient avec passion, la douceur des moments partagés.
Il y a peu de temps, tel un petit caillou blanc sur le chemin d’un conte de Perrault, Thomas Jean Henri avait discrètement publié une très belle relecture du (déjà) magnifique Efface la mer d’Orso Jesenka. J’y avais retrouvé, comme une évidence, un lien de parenté, une délicatesse empreinte de simplicité et de chaleur. La brûlure du moment magique , si rare en fait, que l’on sait la reconnaître et l’apprécier.
Sur ce nouveau single, on retrouve les fidèles, Caroline Gabard, Bonnie Prince Billy et Kate Stables au chant, Sean O’hagan aux arrangements. Et à nouveau, cette même impression de partager à l’unisson un moment merveilleux d’équilibre, de simplicité et de délicatesse. Comme un ami que l’on n’osait espérer se joindre à eux, c’est François Marry qui s’invite en bonus à ce single, et nous offre Là, sous le vent, magnifique version française de “Here, in the Wind”.
L’artwork des deux singles, signé du duo belge boldatwork, est une extension sensorielle de l’univers musical de Cabane. La pochettedu premier single figurait cette fameuse cabane, que l’on imaginait comme un frêle refuge entre ciel et terre. La pochette du second, nous ouvre l’espace : l’air, la terre, la mer… et le feu d’une flamme intacte, qui brûle une nouvelle fois, dans ces deux nouveaux titres.
Ces morceaux me sont déjà indispensables. Comme une autre cabane à Liverpool, je ne cesse d’y revenir, d’y apprécier chaque note, chaque mot, chaque silence, de retourner une face, puis l’autre, de m’y réchauffer, l’âme et le coeur.
En deux singles et six chansons, Thomas Jean Henri est devenu cet ami inconnu — ce “frère” comme disait Daniel Darc — avec qui je partage discrètement une partie de mon intimité.
Lorsque je travaille, j’utilise des boîtiers numériques: Canon pour filmer, Nikon pour la photo de concert, mais toujours en mode manuel… La GoPro est un outil complémentaire très maniable, discret, amphibie. En un mot, génial! Filmer avec elle rend les choses ludiques, faciles. Quant au Nikon F100, il reste mon préféré… J’adore le son de son déclenchement, son ergonomie. L’argentique entretient la magie de l’attente, de la surprise, de la découverte, de l’accident créatif. Je photographie mon entourage avec lui, en noir et blanc. J’aime aussi faire de la photo macro abstractive: interroger la matière, la caresser du regard, la caresser tout simplement. L’objectif macro AF 105mm1/2.8 est parfait.
L’ordinateur centralise tout: le traitement de l’image, le montage vidéo. J’écoute grâce à lui énormément de musique sur internet, au casque, pour alimenter mon blog et mon désir insatiable de nouveaux sons.
Je collectionne les disques, les films, les livres. Je peux dormir par terre, mais pas sans livres à portée de main. Bowie est le premier artiste que j’ai admiré. Warsawa est mon titre préféré sur Low, quand Philip Glass l’a retravaillé, je suis tombée à genoux.
Dans Agua viva, C. Lispector travaille la matière de l’écriture, la sensation, à la manière d’une plasticienne. J’aime l’intensité, la passion qui animent son oeuvre. Ce titre est doublement évocateur: je vis en bord de mer. Harold et Maude, parce que j’ai le goût des fleurs simples… Saul Leiter pour son usage virtuose du flou, des silhouettes et des reflets, extraordinairement poétique. Modern Architecture since 1900 a été acheté un soir à Los Angeles chez Borders, à Santa Monica, librairie fermée aujourd’hui. J’ai toujours été attirée par la conception d’espaces, et l’architecture contemporaine américaine. Par la conception dans l’espace aussi: en peinture comme en sculpture. Il me semble vital de se laisser traverser quotidiennement par la beauté, sous toutes ses formes. On peut mener une existence modeste mais vivre sans beauté me semble inconcevable.
On met un certain temps à trouver la plume parfaite, à la faire, comme on dit. Je note mes idées, griffonne mes croquis dans un carnet, mes rendez-vous dans un agenda, tout comme j’écris des histoires sur des cahiers à spirale: à l’encre noire de mon stylo fétiche.
J’ai hérité de cette montre à gousset et vraisemblablement de nombreuses aptitudes de mon grand-père. Je ne porte de montre que lorsque je travaille au contact des gens. Lorsque je suis seule, je sais parfaitement l’heure qu’il est. Parfois à la minute près. Je possède peu de bijoux, ne souhaite plus me maquiller. Un parfum dit beaucoup d’une femme, j’apprécie qu’il soit léger. J’aime l’intemporalité, les caméléons qui se transforment cycliquement, jouent avec leur image. Tout détail m’importe: le choix des matières, des coloris, des lignes. C’est la synthèse des influences, le référentiel, et la note de fantaisie qui me portent vers tel vêtement ou tel objet.
Le travail de François Quesnel, que l’on retrouve dans la boîte ronde en céramique, me parle énormément. François m’a transmis son goût de la pièce unique, de la relation poétique à la terre. Lorsque je jardine, je me relie souvent à lui en pensées, et à mon grand-père, aussi. Mon jardin est mon deuxième bureau.
Certes, il reste des objets que je n’ai pas commentés.
Il n’y a rien à en dire, j’y tiens, et c’est tout.
Je me rends compte aussi que la plupart des objets de cette sélection m’ont été offerts.
En dehors des êtres chers, voici quelques-uns de mes essentiels.
Les Doc Martens: Depuis 25 ans, je n’ai porté que deux types de chaussures : tout d’abord des rangers pendant une dizaine d’années, et par la suite, des Doc Martens. On devine bien que je n’ai aucun attrait pour l’habillage du pied.
Les lunettes: À l’âge de 6 ou 7 ans, non content d’être un gamin enrobé, j’allais devenir binoclard.
Le Pod (le haricot rouge, sur le synthé): Le simulateur d’ampli est un outil très utile lorsqu’on vit en appartement et qu’on respecte un tant soit peu la quiétude de ses voisins. Toutefois, je me souviens d’une époque où j’enregistrais des prises de guitare électrique, à partir d’un ampli repiqué avec un micro, sans me soucier le moins du monde des nuisances sonores que cela pouvait provoquer. J’en profite ici pour faire mon mea culpa !
Les guitares: Ce ne sont pas précisément les guitares qui figurent sur la photo mais l’instrument – l’outil – qu’elles représentent qui m’est essentiel, surtout pour composer (à la guitare acoustique), et pour faire du bruit (la guitare électrique) car je suis un piètre guitariste et je pratique très peu. Cela dit, ce n’est pas un hasard si j’ai choisi de faire figurer sur la photo ma Telecaster. Elle est le fruit d’un heureux concours de circonstances, puisqu’il y a plus de… 25 ans, je l’avais vue dans la vitrine d’un magasin de guitares d’occase, à Pigalle, et elle m’avait bien tapé dans l’œil. Cependant, je venais de m’acheter une superbe électrique chez un luthier qui avait développé des modèles avec des caisses en métal ; l’achat d’une autre guitare électrique n’était donc pas d’actualité. Quelques mois plus tard, en assistant à un concert d’un collègue de travail de Mikaël (une « grosse bête » à la guitare, comme on dit, et un bon chanteur, qui plus est) à l’Espace Ornano, je revois la Telecaster en question sur la scène, comme guitare d’appoint. Encore quelques mois plus tard, le collègue de Mikaël décide de la revendre, et là, je me suis dit qu’elle serait pour moi ! Voilà pour l’anecdote.
Le synthé: Suite de la panoplie du bricoleur musicien : un clavier. Rien de très original, mais essentiel afin de piloter les banques de sons pour les arrangements « orchestraux » (à défaut de pouvoir se payer un ensemble symphonique, ou même un quatuor à cordes).
Le micro (sur le synthé, à gauche): Fin de la séquence « matériel de musique » avec un microphone. C’est plutôt utile quand on ne sait pas écrire la musique et qu’on veut retenir les mélodies trouvées… Jusqu’à il y a 3 ans, j’enregistrais guitare acoustique et voix à l’aide d’un vieux micro Shure SM56 donné par une âme charitable à une époque où je n’avais pas encore touché un manche de guitare autrement qu’avec des doigts tremblants, tout fébrile et impressionné que j’étais, perdu devant un monde à domestiquer (je devais juste savoir faire un Mi mineur). Récemment, j’ai fait l’acquisition d’un micro un peu plus performant (celui de la photo), qui m’a permis de me sentir un peu plus à l’aise avec ma voix. Et depuis, j’ai quand même appris quelques accords supplémentaires.
La photo de mon bureau et des ordinateurs (à gauche, au-dessous du synthé): Travaillant à domicile, je passe le plus clair de mon temps dans ce capharnaüm organisé. Longtemps réfractaire à l’informatique (probablement l’une de ces stupides postures qu’il m’arrive parfois d’adopter), mon activité professionnelle m’a pourtant amené à devoir maîtriser cet outil il y a à peine une quinzaine d’années. Aujourd’hui, il me serait impossible de m’en passer, tant du point de vue professionnel que du point de vue de la musique. Et voilà comment on se retrouve avec, en gros, un PC majoritairement dédié au travail et un Mac pour la musique.
Le casque : Sûrement pas la meilleure chose pour les oreilles, surtout lorsqu’on en porte un 8 à 10 heures par jour, mais essentiel pour le travail.
La bouteille d’eau: C’est impératif ! Vital !
L’imper de Colombo: Enfin, disons, dans le style Colombo. Des années durant, j’ai porté celui de mon père. Je pense qu’il était devenu encore moins frais que l’imper de ce cher lieutenant (voire même, que Peter “Colombo” Falk lui-même). J’ai dû le remplacer.
L’écharpe : Complètement accro. Une bonne drogue quand on est sensible de la gorge.
Les CD (photo en bas, à droite): Pendant quelques années, j’ai connu une relative précarité, sans avoir réellement à en souffrir grâce à mon peu d’appétence pour la consommation. Seul gros point noir, je le reconnais: ne pas pouvoir acheter d’albums. J’empruntais des CD à la médiathèque municipale ; j’avais également des amis bienveillants qui m’en prêtaient et parfois m’en gravaient. C’était la fête ! Au sortir de cette période de disette, quand j’ai pu à nouveau me procurer des albums, une sorte de boulimie compulsive s’est emparée de moi. Devant le ridicule de la situation, j’ai fini par me calmer, mais il me reste encore une pléthore de CD dont le contenu n’a fait qu’effleurer mes tympans. L’ensemble occupe un mur entier de mon appartement. Ce n’est pas malin lorsqu’on habite dans un petit appartement! À vrai dire, j’avais surtout faim de musique, bien sûr !
Les vinyles: J’ai rapatrié, de chez mes parents, quelques vinyles qui me sont chers : ces BO de Morricone (et de Michel Magne, aussi…) que j’écoutais, enfant, et dont la musique et les pochettes ouvraient les horizons du petit banlieusard de rien que j’étais.
Le sac noir: Avant ce sac – et ses prédécesseurs, du même acabit – j’utilisais des sacs FNAC. La grande classe.
Les livres sur le Portugal: Ça, c’est un petit clin d’œil au Portugal, un pays que j’adore et qui me manque.
Le bloc-notes: J’en ai usé, des blocs notes ! Grands, petits, tout me va. Je note des tas de choses différentes dessus, et quand j’en cherche une en particulier, je mets toujours un temps fou à la retrouver.
Quelques ouvrages de Céline & Kafka: Là encore, rien de très original. Céline, je n’en suis toujours pas revenu. Quant à Kafka, c’est un peu grâce à lui – si, si ! – et beaucoup grâce à un ami metteur en scène, que j’ai repris un semblant de confiance quand cet ami m’accorda la sienne, de confiance, en me chargeant de la musique d’une adaptation théâtrale de « La colonie Pénitentiaire », une formidable nouvelle de Kafka. À l’époque, j’avais plus ou moins laissé tomber la musique. Mais je m’égare… D’une manière générale, la lecture tient une place importante dans mon quotidien, sous diverses formes, cependant pour être franc, pas autant qu’elle le devrait. Je cède un peu trop souvent aux sirènes du 7 ème art.
AU DÉBUT
— Quels sont tes premiers souvenirs musicaux et/ou (photo)graphiques ? Quelle(s) image(s) en gardes-tu ?
Stéphane — Le premier souvenir musical, celui qui rentre dans la catégorie “a marqué” , remonte à l’adolescence. Je devais avoir 15 ans. Je passe l’après-midi chez un copain, qui habite pas loin de chez moi, un peu plus âgé (je ne rappelle même plus son prénom et son nom), beaucoup plus “punk” surtout. Je repars de chez lui avec une K7 de The Smiths (en face A) et de In the Nursery (en face B). C’est ce jour là, que j’ai compris qu’il existait d’autres musiques, d’autres groupes, d’autres alternatives. Je pense que cette K7 est ma pierre de Rosette musicale. Sans elle, je n’aurais pas eu cette curiosité pour la découverte musicale qui m’anime encore aujourd’hui. Le tout 1er cd que j’ai acheté, n’aurait sans doute pas été The Jesus & Mary Chain, et je n’aurais même jamais écouté, quelques années plus tard, les Pixies ou Dead Can Dance.
Le premier souvenir (photo)graphique interviendra quelques années plus tard, début 90, quand je découvre le travail de Vaughan Oliver et de Simon Larbalestier sur le label 4AD. Les artworks de V23 à cette époque m’ont tellement marqué, que pour la 1ère fois, je regarde les crédits des disques pour en découvrir les auteurs, chose que je n’avais jamais faite avant.
“Les artworks de V23 […] m’ont tellement marqué, que pour la 1ère fois, je regarde les crédits des disques pour en découvrir les auteurs”
Y a t’il des liens entre ton parcours photographique et ta passion pour la musique ? Stéphane — Oui forcément, puisque je découvre la photographie par le biais de mon travail (je bosse dans un service de com à l’époque) et que rapidement après, je fais la rencontre d’Erik Arnaud. J’ai donc mis le 1er quasi de suite au service du 2ème, quand Arnaud (son vrai prénom) m’a demandé si je pouvais m’occuper de l’artwork de son 3ème album “l’armure”.
L’occasion de participer, à ma manière, à la sortie d’un disque pour un artiste de son talent était trop belle, pour ne pas être saisie. Ma 1ère vraie série photographique (de(s)composition) en découle.
Autodidacte, je n’ose pas aller à cette époque vers un travail photographique “conventionnel” parce que j’ai peur d’être jugé par ceux qui sont “photographes” et qui parlent technique avant tout (diaph, ouverture, point, etc). Comme je ne suis pas vraiment graphiste non plus, cette série qui mélange les deux aspects, me permet de ne pas être jugé sur l’un ou sur l’autre aspect, c’est commode.
Toutefois Arnaud, qui sait ce qu’il veut, me demande de lui présenter des “vraies” photographies. Je passe donc le cap grâce à lui, et je fais les séries “renaissance” et “darkness”. Plus tard, quand on se lancera un week-end de septembre 2008 dans les photos pour son disque, je ferais l’expérience du portrait. Mon apprentissage photographique et la musique sont donc intimement liés, puisque le 1er découle du second. Sans cette rencontre avec Arnaud, je ne répondrais pas à ces questions aujourd’hui ; je lui dois beaucoup.
Comment as-tu associé la musique et la photographie ? Est-ce une démarche volontaire ou le fruit du hasard des rencontres ? Stéphane — Je n’ai jamais eu l’ambition de faire de la photo, pour exposer ou vendre mon travail, et je ne me suis jamais considéré comme un artiste, je trouverais ça extrêmement prétentieux de ma part.
Il se trouve juste que j’ai ce savoir faire là, et surtout la chance de réaliser des clichés qui plaisent à un petit nombre de gens, et, en tout cas suffisamment, pour que quelques artistes me demandent à l’occasion, d’illustrer leur propre travail musical.
Qui plus est, quand tu es passionné de musique comme je le suis, sans être musicien (à mon grand regret), avoir la possibilité d’être associé un projet tel qu’un disque, pour des personnes que tu admires en plus, c’est une opportunité qui ne peut pas ne pas être saisie.
Aujourd’hui encore, quand je commence un travail photographique, j’ai toujours en tête qu’il pourra illustrer un jour une sortie de disque. C’est pour cette raison aussi que j’ai toujours travaillé dans l’esprit de séries, pour avoir de la matière dans l’hypothèse d’un travail graphique, pour illustrer la pochette, mais aussi son dos et son intérieur.
GRAPHISME ET MUSIQUE
— Certains mouvements musicaux ont accordés une place essentielle à l’image et au graphisme.
Que penses-tu de cet aspect “visuel” de la musique ? Stéphane — Je dis toujours que le 1er contact avec un disque, bien avant son écoute (pour le public j’entends), c’est la pochette, donc l’image qui y sera associé pour toujours. Il est donc important, mais pas primordial en ce qui me concerne. C’est la cerise sur le gâteau en somme, parce qu’un disque ça reste avant tout de la musique pour moi. Je ne me suis jamais vu ne pas acheter un disque, parce que je n’aimais pas la pochette. A contrario, je ne me suis jamais vu acheter un disque, parce que la pochette me plaisait mais pas la musique.
Toutefois, une pochette peut donner envie de découvrir la musique qui se cache derrière, si on ne connaît pas l’artiste ou le groupe, donc c’est quelque chose qui ne doit pas être négligé. Après, les goûts et les couleurs, c’est autre chose…
Quand je fais une pochette, je me mets au service de l’artiste, il doit être convaincu à 200 % que c’est exactement ça qu’il veut pour illustrer son travail musical. Même si c’est mon travail qui est visible, ce dernier doit rester associé au nom sur la pochette du disque, ce qui est généralement le cas, et c’est tant mieux comme ça.
“Mon apprentissage photographique et la musique sont donc intimement liés,
puisque le 1er découle du second”
Quelle importance accordes-tu à une pochette de disque ? Quel est son rôle ? Stéphane — Moi, je continue à acheter des albums parce que j’aime le disque “physique” associé à la musique. Il y a un coté collectionneur dans cette démarche d’achat. Et si pour le même prix, je peux avoir un objet qui me plaît alors tant mieux. Mais une illustration ne fait pas tout, le choix du papier, du vernis, du support est tout aussi important à mon sens et se sont aussi ces choix là qui mettent en valeur et font la réussite de l’objet. C’est pour ça que j’adore faire des disques pour monopsone, qui donne la possibilité de faire des belles choses.
Pour la collection microcircuit, par exemple, ils ont ainsi décidé de sortir les disques sur un digisleeve trois volets, avec un vernis mat, ce qui augmente le coût de fabrication par rapport à un CD cristal ou même un digipak, avec le traditionnel vernis de base. Mais, le résultat est là, et, quitte à sortir des disques, autant les faire beaux jusqu’au bout même en CD. Pour le LP de Matthieu Malon “peut être un jour”, on a opté pour une sous pochette imprimée avec les paroles des chansons, en lieu et place de la traditionnelle sous pochette, blanche ou noire, en papier.
“…une illustration ne fait pas tout, le choix du papier, du vernis, du support
est tout aussi important à mon sens”
Que penses-tu du “retour” en force du vinyle face à la dématérialisation de la musique et de sa distribution ? Stéphane — C’est forcément une bonne chose. Mais je ne pense pas qu’il y aura un effet durable. La génération “internet” a pris l’habitude de la gratuité de la musique, et même sans parler de téléchargement illégal, tout le monde met à disposition “gratuitement” sa musique via le streaming, ça n’encouragera pas à un retour aux supports physiques, j’en ai bien peur. D’autant plus, que dans le même temps, j’ai l’impression que certains organisent la rareté du vinyle, en en faisant un produit de luxe, via des prix qui deviennent plus qu’excessifs (les frais de port n’expliquent pas tout), la politique du “autant vendre peu, mais cher” quoi (heureusement, on trouve toujours des disques vinyles à des prix accessibles, en général via les “bandcamp” des groupes).
Personnellement, je commence à revenir au CD. Mais à mon grand regret, parce que le format vinyle, c’est une taille adaptée à la photo avec un niveau de détail, que l’on aura jamais sur un CD. Un vinyle, c’est aussi l’obligation, au-delà de l’aspect esthétique, d’écouter vraiment un disque du début jusqu’à la fin, sans la tentation d’appuyer sur le bouton piste suivante.
ARTWORK
— Tu utilises tes propres photographies sur les pochettes que tu réalises. Selon toi, la pochette doit-elle être une véritable réflexion sur la mise en images de la musique où une démarche purement artistique ? Stéphane — Pas de règles. Comme je te disais plus haut, une pochette n’est pas là pour mettre en avant mon travail, mais pour être au service de la musique qu’elle va illustrer. Je ne conçois ce travail que comme une collaboration, avec l’artiste ou le groupe ou le label, si c’est dans le cadre d’une collection bien précise (exemple les fragments de monopsone). C’est donc avant tout un échange, qui permet de donner mon avis, de faire d’autres propositions, si je pense qu’on peut faire quelque chose de plus intéressant. Mais en dernier ressort, le choix revient toujours au principal intéressé, il ne peut en être autrement.
Par exemple, avec Matthieu Malon, que ce soit pour le single “28.02.2013” ou son album “peut-être un jour “, je suis parti sur tout autre chose que ce qu’il avait en tête, après avoir quand même essayé ses idées. Je pensais qu’on pouvait faire mieux, je lui ai donc proposé autre chose et cela l’a convaincu. C’est aussi ce qu’on attend de nous souvent je pense, d’apporter notre vision.
D’ailleurs beaucoup de musiciens aiment, comme pour le mix souvent, confier cette étape du disque à quelqu’un d’extérieur. C’est un vrai choix assumé. Il arrive même ,que l’on commence le travail visuel en même temps que ce fait la création musicale, donc de faire les visuels avant même que les titres soient finis et de les avoir écouté. Ce fut le cas pour “l’armure” et aussi le dernier disque de Nezumi (& Fox). Je fais donc avec les quelques éléments qu’on me donne ou à ma disposition.
Je ne suis pas très “portrait” pour une pochette, je privilégie toujours donc la mise en scène si l’artiste veut apparaître dessus (Matthieu Malon, Bertrand Bestch), mais on peut aussi me donner carte blanche ou vouloir utiliser une de mes photos déjà vu ou me demander une chose bien précise.
“Je ne conçois ce travail que comme une collaboration, avec l’artiste ou le groupe ou le label”
Pour le disque de A Movement Of Return par exemple, le nom m’a de suite inspiré Venise où je me suis pris là-bas un véritable choc temporel. J’ai proposé à Fred un premier travail avec cette photo prise du Rialto et il a dit banco de suite. Il y a à la fois, le mouvement de l’eau, des passants, une vue très ouverte, large et du détail, on a pas cherché plus loin.
Pour le dernier Supercilious, Alex avait une idée bien précise en tête. Un portrait d’une personne âgée dans l’idée du «Staring at the Sea» des Cure. Comme je ne suis pas très “portrait” pour un disque je lui ai fait deux autres propositions qui ne collait pas à ce qu’il avait en tête ; c’est lui qui m’a orienté du coup en 2ème idée, vers la télé et une personne endormie devant. C’était important pour lui, de mettre un vraie personne sur la pochette.
Bref, chaque nouvelle collaboration est différente et c’est ce qui excitant aussi !
Quelles sont tes attentes vis à vis du musicien ou du groupe avec lequel tu collabores sur une pochette ? Stéphane — Une seule, le satisfaire et qu’il soit fier de son disque visuellement. Pas meilleur récompense, qu’un “j’aurais pas rêvé mieux”.
Tu collabores régulièrement avec les labels Monopsone et 03H50. Un label doit-il avoir un univers visuel et graphique qui lui est propre ? Stéphane — Tout dépend de ce que l’on entend par là. S’il s’agit d’imposer un visuel pour identifier de suite un label, je trouve ça dommage. Le label sort les disques dans lesquels il croit, qu’il veut défendre. Mais, chaque disque est différent, tout comme ses artistes ou groupes. Il mérite donc chacun leur propre identité. Sinon, cela voudrait dire que l’on place la structure avant le disque, en dissociant le disque et l’image que son auteur veut lui donner.
Après, pour un label, travailler avec le même graphiste, peut permettre en effet, de combler tout le monde. C’est pour ça que j’ai aimé 4AD, comme je te le disais plus haut.
HALL OF FAME
— Quelles sont la ou les pochettes qui font référence pour toi ? Unknown Pleasures — Joy Division / Design Peter Saville
Green mind — Dinosaur Jr / Photographie de Joe Szabo
Spleen and Ideal — Dead Can Dance / Photographie de Colin Gray
Goo — Sonic Youth / Raymond Pettibon d’après une photo d’un paparazzi sur laquelle on voit Maureen Hindley et David Smith
Surfa Rosa — Pixies / Design V23 avec photos de Simon Larbalestier
Guitare électrique Gretsch SilverJet, un modèle US (what else… ?) acheté au début des années 1990 à Los Angeles. J’étais là-bas pour une interview de Frank Black, au moment de la fin des Pixies. C’est la guitare dont je me servais le plus pendant les concerts de Melville… Puis, après Melville, je me suis remis au piano, qui était mon instrument d’enfance, et j’ai (plus ou moins) rangé mes guitares, mais celle-ci n’est jamais très loin.
La petite chose en plastique rouge posée sur l’extrémité gauche, au dessus du vibrato, c’est ma fille Juliette imprimée en 3D. Cadeau de sa part pour mon anniversaire (oui je sais, c’est assez original…)
Juste à côté, deux touches de piano en ivoire, qui figuraient, du temps de sa splendeur, sur le clavier d’un piano à queue sur lequel a joué David Bowie (et tant d’autres). Ce piano est une ruine aujourd’hui. Pourquoi j’ai ces touches chez moi aujourd’hui… je ne peux pas le dire ici.
Au dessus, une tasse du studio Abbey Road, souvenir de la fantastique journée passée au studio avec Fabien (Tessier) pour le mastering de notre album « Songs of popular appeal ».
Un peu plus haut, une vieille photographie ramenée d’un voyage dans le Tamil Nadu, en Inde. Un peu plus bas posé sur la table, se trouve un rickshaw en format miniature. Deux objets fétiche d’Inde, pays très représenté chez nous.
A l’angle droit bas de la photo, une pierre taillée d’Utah – une « sandstone » – trouvée à Moab, dans ce magasin extraordinaire (si vous êtes allé à Moab, vous connaissez l’endroit).
Les objets que je viens de citer (de « ma fille en 3D » à la sandstone d’Utah) figurent dans une sorte de petit musée perso posé au dessus de mon piano, chez moi. C’est mon « wonderwall » horizontal, un petit territoire de choses perso que j’aime avoir sous les yeux quand je joue.
Toujours sur cette vieille boite de jeux en bois (un jeu de construction) que j’aime aussi beaucoup, la pochette de « Rank » des Smiths en CD. Elle est signée par un grand échalas à lunettes nommé Morrissey qui m’a juré, ce soir-là (c’était à Newcastle, backstage après un concert), avoir été le chanteur du groupe. Ne connaissant pas bien le groupe, je l’ai cru sur parole… (Note aux neuneus : je plai-san-te, les Smiths, c’est ma vie – ou la première partie de ma vie, au minimum).
Ensuite, trois livres… Même si je ne suis pas un grand lecteur, je dévore les récits historiques, ultra-documentés, autour d’aventures et explorations (comme ce « Scott and Amundsen » vertigineux), et j’achète parfois des livres pour le graphisme de la jaquette (« Sentinels of the North Pacific » acheté en Californie) ou pour ce qu’ils représentent dans une culture spécifique (l’auteur Zane Grey, 1872-1939, héros des jeunes lecteurs américains amoureux des grands espaces). Même chose que pour les petits objets fétiche cités plus tôt : j’ai besoin d’avoir ces livres sous les yeux pour écrire des choses, sentir des mélodies, avancer dans les chansons. J’ai besoin de cet environnement visuel.
Pour finir, sur le devant : un vieux puzzle des Etats-Unis d’Amérique, déniché dans une brocante en Caroline du Nord il y a plus de vingt ans (et sans doute mon objet préféré parmi tous), et nos deux copains Haddock et Tintin, parce que c’est en dévorant les albums d’Hergé, enfant, que m’est venue le désir de voir le monde et de m’y balader dès que possible (ce que j’arrive à faire assez souvent grâce à mon métier – un privilège que je mesure chaque jour – pourvu que ça dure, inch’Allah, namaste, good night).
The best things in life aren’t things. I do quite like things though.
Glasses – they help me to see things better. I take them everywhere because I like to see things better. Record – the objective incarnate of a plan with friends. Book – Paul Birtill is this country’s greatest living poet. I tell everybody and tell everybody to tell everybody to tell everybody. Paul Birtill is this country’s greatest living poet. Pen – I like stationery. I love fountain pens. This is a Parker 25 fountain pen which my Dad passed on to me when I started secondary school and still use it every day. Camera – my first SLR camera, totally mechanical – where physics, chemistry, art and expression collapse in a heap together laughing. Shoes – desert boots, size 11, square toe, battered and ancient – if shoes could talk… A note – I like handwritten notes too. I especially like this handwritten note. iPhone – magic. Headphones – the National Health Service should prescribe proper “shut out the world” headphones to children. A free pair to every three year old. Seriously life-changing and the path to pure pleasure and fullfillment.