Top 10 albums 2016 / Magic rpm

10 bonnes raisons d’aimer (quand même) 2016…
L’intimité d’un single devenu un refuge, comme une autre cabane à Liverpool — Les vertigineux méandres avant gardiste du tryptique de David Thomas Broughton — La sublime pop-folk baroque 70’s de Whitney — Les sommets du folk majestueux de Kevin Morby — La découverte fascinante du compositeur russe Mikael Tariverdiev — La magnifique extravagance de l’homme-orchestre-objet-disque (Chevalrex) — L’incandescence musicale d’Ellery Roberts avec son nouveau projet LUH (Lost Under Heaven) — Le classicisme instantané du premier album de Michael Collins (Drugdealer) — La (re)naissance du phoenix Will Sheff — La confirmation de l’immensité du talent orchestrale de Jóhann Jóhannsson.
Et puis l’éternel “Michael Head and The Strands” qui, comme chaque année, est mon meilleur album du monde.

1 – Cabane “Wooden Home / Here, In The Wind” 7″ (self edited)
2 – David Thomas Broughton “Crippling Lack” (Song, By Toad/Paper Garden Records/Le Noize Maker Records)
3 – Whitney “Light Upon The Lake” (Secretly Canadian)
4 – Kevin Morby “Singing Saw” (Dead Oceans)
5 – Mikael Tariverdiev “Film Music” (Earth Records)
6 – Chevalrex “Futurisme” (Vietnam / Because Music)
7 – LUH “Spiritual Songs for Lovers to Sing” (Mute)
8 – Drugdealer “The End of Comedy” (Weird World)
9 – Okkervil River “Away” (ATO REcords)
10 – Jóhann Jóhannsson “Orphée” (Deutsche Grammophon)

Ecouter la playlist sur Spotify

 

Ce classement a été initialement publié dans le calendrier de l’avent 2016 de Magic, Revue Pop Moderne.
(merci Vincent !)

David Champion

LES ESSENTIELS DE DAVID CHAMPION

Here you can see a collection of objects which are important to me both sentimentally and practically.

The guitar is a 1960s Gibson which I found at a flea market in Paris for a fraction of the price it should have been. It’s been a loyal and important companion ever since.

The device in the upper middle of the picture is an audio interface which we use for demoing all of our new music and as such, is a pretty crucial member of the CHAMPS team, along with the microphone on the right hand side of the picture.

Mike and I both have an interest in photography which is reflected by the two photography books here, and the two film cameras you can see which have accompanied us on many excursions and have both captured many memorable moments.

Papillon is one of my favourite books and I find this tale of human endurance and spirit against all odds to be truly inspirational.

Bodysurfers and The Cruel Sea are also personal favourites.

The red book on the right and the typewriter in the middle are both very important tools for writing. I find using a type writer to be particularly satisfying and cathartic.

Paul Simon’s Graceland has been my go-to album for the past few years and I have such huge respect for the way Simon constantly reinvents himself musically.

Finally the watch in the lower middle of picture is an heirloom which I wear every day.

David Champion (from Champs)
Décembre 2016

 

More information about David Champion and Champs
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thomas jean henri (jour 5)

LES ESSENTIELS DE THOMAS JEAN HENRI

pascal, rencontré à paris un vingt deux septembre 2016, est un homme qui écrit.

A l’encontre

les gens sont bizarres.
suis-je ma normalité ?
sont-ils si différents ?

j’aime les gens.
je ne m’aime pas assez,
ou peut-être trop ?
défier les habitudes,
jouer avec son danger,
regarder ailleurs.

j’aime la différence.
courir sur l’horizon,
bousculer le confort.
le jeu des 7 erreurs n’en est pas un,
c’est une chance.

j’aime la rencontre.
la première.
briser le miroir.
se confier mais pas trop,
on ne sait jamais.

j’ai rencontré thomas dans sa cabane,
j’ai craqué une allumette
et nourri le feu.

pascal
novembre 2016


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thomas jean henri (jour 4)

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LES ESSENTIELS DE THOMAS JEAN HENRI

julien, rencontré à nantes un vingt et un novembre 2015, est un homme qui écrit.


je ne sais pas très bien ce qui fait que l’on se rencontre. la plupart du temps on se manque. on se passe à côté, tout empêtrés que nous sommes dans nos vies respectives (et distraits, il faut le reconnaître).

et puis parfois, la mer s’efface, nous voilà libérés de nos insurmontables insularités, et on se rencontre. il me semble que c’est ce qui nous agite au fond, atteindre l’autre qui habituellement se dérobe. on se doute, quoique confusément, qu’il n’y a rien de plus important que ce tressaillement de l’âme et du cœur.

une première rencontre répète les suivantes, celles que très vite on vient à espérer et qu’il nous faudra provoquer ou attendre.

c’est une répétition mais quand elles sont réussies, (on peut rater une première rencontre, ce n’est pas forcément rédhibitoire) on ne joue pas la comédie, c’est inutile et cela obligerait à différer la rencontre.

c’est une répétition mais on y chérit nos erreurs et nos maladresses, elles nous ressemblent et il est doux de s’y rencontrer soi-même.
on s’y reconnaît mutuellement comme l’autre qui comptera, sur qui l’on pourra compter et qui pourra compter sur nous.

cet autre qui aura à nous en raconter (sur nous aussi).

cet autre dont le cœur content suffira à nous contenter nous mêmes.

le 21 novembre 2015, à 700 kms de marseille et de bruxelles (il fallait bien cela), et alors que la tristesse recouvrait presque tout, j’ai rencontré thomas.

julien
novembre 2016


plus d’informations sur  julien : www.facebook.com/Orso-Jesenska
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thomas jean henri (jour 3)

LES ESSENTIELS DE THOMAS JEAN HENRI

coraline, rencontrée un douze décembre 2015 à schaerbeek, est une femme qui écrit.


à force de se croiser, d’échanger ou de partager des cafés, il peut arriver aux humains de se rencontrer.
à la faveur du hasard, par le truchement de circonstances mal définies, d’émotions vaguement digérées: la chose a lieu.
elle fait irruption, arrimée à l’instant, et ce n’est qu’à posteriori, à contretemps, qu’il devient possible de la nommer.

ce que dévoile cette occasion ne ressemble à rien de connu, de promis ou d’espéré. rien d’autre que la vérité d’un lien qui n’exige pas mais impose un constat: le mystère de qui nous sommes momentanément dévoilé.

face à face, côte à côte, cernés par le silence et le verbe alternants, nous empruntons une fréquence et une acuité inédites qui se dissoudront aussitôt l’instant passé.

nous-nous rencontrons à l’endroit précis où nos impossibilités se rejoignent. chacun laissant l’autre au bord de sa fracture à se demander comment cette fois il sera possible de la contourner, de la réduire ou pour un temps s’y noyer. nous restons interdits, implacablement isolés face à la solitude de l’ami, l’amant, le parent approché. infiniment condamnés à rester sur la rive de sa propre complexité habitée par les ombres, les congères, les lumières du passé : ce terrain vague où une mécanique s’est au fil des ans dessinée, cette zone grise à laquelle sans cesse nous revenons parce que c’est tout ce qui jusqu’ici nous a été enseigné.

nous-nous rencontrons quand sur la table offrandes et limites sont déposées. simultanément, généreusement, fermement. quand il n’y a plus personne à sauver, à maudire, à implorer. à l’instant où quelque chose en soi, en l’autre, s’est conjointement incarné. par la précision des mots, la présence, la minutie des gestes et des regards plantés. justes. juste plantés dans cet irrésistible présent qui dit me voici. tel qu’en moi-même, me voici. tu peux parcourir mon corps, retourner ma peau de bête et d’enfant mal né. tu peux investiguer, investir l’arrière de mes pensées, les tiroirs de mon appartement, la face cachée de mes rêves. tu peux le faire mais cela t’épuiserait parce que tu n’y verrais rien. rien d’autre. aucune autre réalité. pas de plus grande sincérité ni de meilleure possibilité qu’à cet instant précis, ce moment donné où par la grâce d’une quelconque vérité nous-nous sommes vus, dévoilés.

ici un risque. ici un miracle. un don. une fragilité.
ici un fanion vaillamment planté sur la cime de notre humanité.

il arrive que ces rencontres premières aient lieu et libèrent un espace où le lien se noue, ou se défait ; quand tour à tour reconnus et reconnaissants, renonçant à la fuite, nous est enfin donnée la possibilité d’aimer.

coraline
novembre 2016


plus d’informations sur coraline : breche.org
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thomas jean henri (jour 2)

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LES ESSENTIELS DE THOMAS JEAN HENRI

jean, rencontré un deux septembre 1972 à braine l’alleud, est un homme qui écrit.


si les pavés sont toujours les mêmes, un peu plus luisants que la veille à cause de la pluie battante de la nuit, mes pas ne sont plus tout à fait les mêmes.

me suis-je dit, il devrait toujours pleuvoir ces matins-là pour mieux camoufler la pudeur des larmes de joie.

hier, il n’était pas là.

maintenant, il habite mes pensées jusque dans mes pas.

d’apparence, plus assurés que la veille mais je sais qu’il faut se méfier des enjambées nerveuses qui accompagnent la béatitude des premières rencontres.

demain, déjà, je sais qu’elles se feront plus mesurées, plus fragilisées, plus attentives aux petits pas espiègles qui me suivront.

dans une inébranlable permanence: que les pavés des rues glissent sous les généreuses averses ou brillent sous un soleil accablant n’y changera rien.

je ne marche désormais plus seul.

jean
novembre 2016


Plus d’informations sur jean : www.vudelavallee.be
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thomas jean henri (jour 1)

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LES ESSENTIELS DE THOMAS JEAN HENRI

une fois par jour, juste le temps d’une semaine (jour 1)

et si, nos essentiels se trouvaient là.
juste là,
à l’aube de la première rencontre,
de cette idée,
de cet instant fragile,
de ce moment intensément précis,
où l’on a ouvert les yeux sur l’autre.

quel mot,
silence,
hésitation,
maladresse,
blague pourrie,
yeux baissés ou regards affrontés,
ont créé l’émoi,
la naissance d’un sentiment amoureux

avons nous consciemment choisi entre l’intense passion
et l’amitié profonde ?

qu’est ce qui nous a si intimement troublés
dans cet instant tangible et flottant ?

qu’est ce qui nous a vraiment appartenu ?

et puis,
puis, avec le recul des jours passés,

qu’avons nous gardé en mémoire de nos premières rencontres?

quels souvenirs avons-nous retenus pour construire notre propre histoire ?

et puis enfin,
peut-être répondre à celle qui.

celle qui si souvent
me demanda de lui écrire quelques mots,
quelques mots choisis sur notre première rencontre.

ce que,
par la force des choses,
je ne fis jamais.


en ce mois de novembre deux-mille seize,
j’ai proposé à quatre personnes qui écrivent.
de m’envoyer quelques mots,
quelques mots choisis sur l’idée de la première rencontre

thomas jean henri
novembre 2016


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Alain Bibal

LES ESSENTIELS D’ALAIN BIBAL

Pet Sounds Mono UK First Press
Leica M6 – 35 mm
Leica M7 – 50 mm
Rolleiflex 2.8f
Levi’s Suede Jacket
Badges : SMiLE, Allah-Las, Brother Records (Merci à Matthew Correia)

Alain Bibal
Novembre 2016

 

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bibalbibal.tumblr.com

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Laura Le Baron

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LES ESSENTIELS DE LAURA LE BARON

Le vinyle de Véronique Sanson : “Live At The Olympia” de 1976. Cette femme c’est une telle force, un talent de compositrice et d’auteur évidemment, une sacrée battante qui s’est imposée sur les scènes au même titre que les chanteurs de l’époque, mais une force dans sa propre vie également (elle a vécu avec un homme violent pendant plusieurs années, a tout supporté pour ne pas perdre la garde de son fils…). J’aime chanter très faux et très fort des morceaux comme Redoutable ou Une Nuit Sur Son Epaule, qui me touchent beaucoup. Bref, Véro, dans le genre piano/frissons/femme géniale, avec Barbara, il n’y a pas au dessus!

Le vinyle de Paul Simon, il me rappelle l’enfance, sa voix est douce, ce n’est que plus tard que j’ai compris quelle ampleur avait eu cet artiste sur la musique ! Ses curiosités, ses découvertes, la tournée avec les sud africains et toute la polémique… Le vinyle appartient à ma mère, on a du me le faire pas mal écouter car il est très rassurant. Mother And Child Reunion est ma préférée. Et Paul est si beau sur la pochette !

“Ma Nuit Chez Maud”, premier Rohmer vu, premier coup de foudre cinématographique pour l’univers de ce grand monsieur. Et Trintignant. “Avez vous lu Pascal ?” ça change de “T’as de beaux yeux tu sais !” mais ça veut dire pareil. Et ce film où les personnages frôlent les choses, se battent avec leurs envies, leurs idées, les conventions. Je le regarde assez peu souvent mais je n’aimerais pas le prêter trop longtemps. C’est beau de le revoir.

Le vinyle de “Grand Tour” d’Orouni. Un groupe dont j’ai fait la promo, je l’ai découvert par mon travail donc, grâce au label Sauvage Records, c’est un super projet, pourvu qu’on aime la pop en anglais, et sur celui-ci particulièrement, les voyages… un prochain disque se prépare.

Mes sandales. Cette année elles sont dorées, j’aime l’été pour marcher en sandales, c’est régressif, signe de vacances, on peut les emporter partout, et je déteste marcher pieds nus !

“La Reproduction” d’AFD, un magnifique disque. Un disque dont j’attends la suite depuis six ans, entre espoir et désespoir. En boucle, je l’ai écouté. Des jours. Des semaines. Des mois durant. Quel grand disque ! Il reviendra, j’en suis sûre !

Mon nouvel agenda et mes cartes de visite. Le premier m’est indispensable. J’oublie absolument tout sans lui. Les deuxièmes trainent dans tous mes sacs, et je suis fière de mon logo, dessiné par Sylvain Oger.

Ce vinyle de George Harrisson, “Give Me Love Give Me Peace On Earth” il dit tout dans le titre, qu’il était beau dans sa barbe ce George ! Un gourou d’amour et que ses mots résonnent dans le vide aujourd’hui! Ce titre est doux et plein d’espérance, j’aime bien l’écouter, au bureau, où est la platine.

“La Noce” de Pavel Lounguine. Alors ce film fut une bouffée de Russie contemporaine, à sa sortie, une belle découverte pour moi qui ai étudié au lycée le russe. Je galérais! Ce conte plein d’accordéon, de mafia, de campagne moscovite est d’une grande tendresse. Le mariage y est sublime, une cérémonie orthodoxe.
Est il fidèle à la Russie d’aujourd’hui ? J’aimerais croire que oui, mais je fantasme ce pays, en attendant d’aller marcher dans les forêts de bouleau, au chant des loups…

L’un de mes plus beaux souvenirs de lecture c’est “Balzac et la petite tailleuse chinoise” de Dai Sijie, qui vit en France aujourd’hui. Il raconte la révolution culturelle, ses horreurs et la résistance par la préservation de quelques ouvrages “interdits” car subversifs. Dont ceux de Balzac. Et l’initiation à la lecture d’une jeune villageoise illetrée par le héros, qui va transformer – forcément – sa vie. Cela ne m’a pas fait aimer Balzac mais les autres ouvrages de Dai Sijie oui !

La petite tasse anglaise appartenait à ma grand-mère, elle ne devait pas s’en servir beaucoup, elle a l’air neuf, je l’ai récupérée dans son appartement, elle est partie il y a cinq mois. Ca me parait encore impossible. Un grand vide.
C’est un petit bout d’elle dans un objet que j’utilise au quotidien, car je bois beaucoup de thé, et j’aime bien cette idée quand j’ai peur de l’oublier. Elle est chic et ringarde en même temps avec ses petites fleurs dorées. Je l’adore.

“Oncle Vania” de Tchekhov. Quand je faisais du théâtre je voulais jouer Sonia, la fille moins jolie, celle qui bosse sur le domaine familial en ruine et se sacrifie jusqu’au bout pour le maintenir à flot, qui aime le médecin en secret, sans qu’il ne l’ait jamais regardée. J’avais finalement suivi les conseils de mon prof, et joué Elena. L’autre femme. Belle et riche, assez antipathique. Et c’est toujours mieux de jouer le personnage qui ne vous ressemble pas à priori. Tchekhov en français ça peut être poussiéreux, ennuyeux, comme par Podalydes parfois, à la Comédie Française, alors que c’est la Russie qui s’écroule, celle d’un XIXe conscient de ses défis et de ses faiblesses.

Le parfum c’est “Amour” de Kenzo. Je l’ai depuis des années. Ca doit être mon parfum d’adulte. J’ai appris que c’était un parfum “de peau”, qui ne se sent qu’à une petite distance, contrairement à un parfum “de sillage” (ceux qui cocottent à deux cents mètres !)

“Le Festin de Babeth” c’est le premier film que j’ai vu au cinéma apparemment. Un film incroyable, Stéphane Audran (quelle femme !!) est un chef français qui a fui La Commune et sert dans une communauté très religieuse au Danemark. Un jour, elle prépare un repas incroyable pour les membres de cette “secte” et c’est jubilatoire de les voir réagir (à ce pêché qu’est d’apprécier la bonne chère !).

Ce portrait de Jay Jay Johanson par Julien Bourgeois m’a été offert par mon amie Valérie, qui tient la belle boutique French Touche, rue Legendre dans le XVIIème. Après le bel accrochage de Julien Bourgeois dans sa boutique il y a quelques années, sur son livre “Swedish Music Landscape”, elle m’a fait ce cadeau !
Jay-Jay, c’est un artiste que j’admire beaucoup, et pas uniquement pour sa merveilleuse chanson “Laura” (je l’aimais déjà avant !) Il incarne un éternel chic, romantique, c’est un dandy, un poète…

L’affiche des “Demoiselles De Rochefort” de Jacques Demy, film de l’enfance, de la musique, de la joie. Demy c’est un appel à l’enfant en nous c’est magique. On l’aime tous je crois, il n’y a rien de très original dans ce coup de cœur. Si ce n’est que ce film termine de rendre amoureux de Piccoli pour toujours et à jamais. On a envie que les jumelles le reconnaissent à chaque instant. Simon Dame. ♡♡♡

Et enfin, la cerise sur le canapé, mon chat Hedda. C’est un personnage, pas une personne, qui prend beaucoup de place. Elle compte beaucoup. Les chats ne vivent pas chez nous mais avec nous, et la plupart du temps, nous vivons chez eux.

Laura Le Baron
Septembre 2016


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Le Mange Disque, portrait d’un fanzine

Logotype Le Mange Disque © Fred Le Flaher

AU DÉBUT

L’histoire du Mange-Disque commence donc en 2005…
Fred Le Falher — Oui, ça démarre comme souvent par une bande de copains réunis autour d’une même passion pour le rock. Au départ, on est cinq : Bruno Mosnier, Fred Sérager, Daniel Aimé, Jeff Vidal et moi-même. On est en 2005, on a entre 30 et 40 ans (sauf Daniel, notre doyen : la petite soixantaine), on boit des coups, on voit pas mal de concerts, et on se dit que ce serait cool de construire quelque chose ensemble, de transformer cette amitié en une réalisation concrète, durable.
Certains montent un groupe ou un festival, nous on a créé un fanzine. Il n’y avais pas de fanzine à Aurillac, et on trouvait marrant de se lancer là-dedans à nos âges, alors que les fanzines sont plutôt un truc qu’on fait à 20 ans.

Pourquoi en 2005, choisir d’éditer un fanzine papier alors que les webzines fleurissent sur internet ?
FLF — On est tous attachés à l’objet : les disques, les vinyles, mais aussi les bouquins, la presse, les affiches… Nos maisons ou apparts sont gavés de tout ça, les étagères débordent, ça n’en finira jamais. Donc, il était hors de question dès le départ de faire un web-zine : on voulait un truc imprimé et relié, à l’ancienne, un journal qu’on puisse glisser dans un sac, lire aux chiottes, conserver dans une étagère, bref, un “vrai” fanzine.

“Certains montent un groupe ou un festival, nous on a créé un fanzine” — Fred Le Falher


Quelles étaient vos envies en créant un fanzine ?

FLF — On a fait une réunion ou deux (bien arrosées) pour définir ce qu’on voulait faire, et on a adopté une série de parti-pris bien définis :
– on parle de ce qu’on veut, sans lien nécessaire avec l’actualité
– on défend chacun notre petit univers personnel : Bruno plutôt punk, Fred des trucs assez “arty”, Jeff n’écoute que du reggae, moi plutôt de la pop, Daniel raconte ses anecdotes de vieux routard des concerts parisiens…
– chaque sujet doit avoir un rapport avec la musique, c’est la seule contrainte
– on se fait plaisir à défendre des trucs qu’on adore, on ne fait pas d’articles “contre” mais “pour”.
On a sollicité d’autres copains autour de nous, nos frangins, des gens susceptibles de collaborer régulièrement ou ponctuellement au Mange-Disque… Au total, en plus du noyau dur des cinq zigottos du début, il doit y avoir une bonne trentaine de personnes qui ont écrit dans le fanzine.

Pourquoi Le Mange-Disque ?
FLF —  Ça a failli s’appeler “Single”, et puis finalement on a choisi Le Mange-Disque, parce que ça faisait moins prétentieux. Un Mange-Disque, c’est presque un jouet, c’est un appareil pour les enfants, ça nous allait bien. Ça fait pas trop sérieux, ça exprime une forme de légèreté, une approche plutôt ludique de la musique, c’est un nom qui nous plaisait bien parce qu’on avait envie de se marrer, quand même, avec ce fanzine.

© Le Mange-DIsque / Fred Le Falher

Et le format carré ?
FLF — On voulait faire un objet un peu soigné, un beau fanzine, pas un truc punk photocopié en A4. On se disait “tant qu’à faire un fanzine de vieux, autant le faire bien”. Le choix du format carré s’est imposé assez vite, et pas seulement carré : 18 cm de côté, comme un 45 tours. Et ça collait bien avec la forme du journal : un mange-disque, ça ne permet de lire que des 45 tours, donc format carré.

Du coup, vous tenez un concept ?
FLF — Oui, car ce format-là, en plus, nous permettait de vendre le fanzine dans une pochette plastique transparente (comme les 45 tours). Du coup, non seulement la pochette rappelait le 45 tours tout en mettant en valeur le fanzine, mais en plus ça permettait de glisser notre fameux cadeau à l’intérieur, chose impossible sans la pochette. Et ça, c’était vraiment la cerise sur le gâteau de notre projet : accompagner chaque numéro d’un petit cadeau-collector, comme le Pif-Gadget de notre enfance.
En fait, on s’est dit “voilà, le Mange-Disque sera le Pif-Gadget du fanzine rock”. Ça veut dire qu’à chaque numéro, on devait trouver un petit cadeau différent, mais pas cher car sinon on se retrouvait avec des cadeaux plus chers que le coût du journal.

“On s’est dit : voilà, le Mange-Disque sera le Pif-Gadget du fanzine rock” — Fred Le Falher

Qu’avez-vous fait comme cadeaux ?
FLF — On a fait des cartes postales, des stickers, des sous-bocks, des magnets, des ballons, des préservatifs, des badges… Ça fait des petits objets-promo marrants, c’est cool.
On a même fait très fort pour notre numéro 10 : le cadeau, c’était un vrai 45 tours, un split-record avec un groupe sur chaque face , Les Glums et les Cracbooms, deux jeunes groupes d’Aurillac qu’on aimait bien, en vinyle rouge (!), et avec une pochette ouverte et réversible (pochette avec photos de Daniel d’un côté, et des dessins à moi de l’autre côté). Et tout ça pour 1 euro de plus qu’un numéro ordinaire. Bon, inutile de te dire que ce numéro-là a été épuisé très vite !!!

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher
Les cadeaux du Mange Disque : badges, 45t collector, cartes postales, stickers, sous-bocks, magnets, ballons, préservatifs…

AU FIL DES NUMÉROS

Comment se sont répartis les rôles dans le fanzine ?
FLF — Le plus important, c’était que chacun fournisse des articles. Pour le reste, on a fait en fonction des compétences ou des envies des uns et des autres… Bruno M. s’est occupé de la compta, il est plutôt bon là-dedans. Fred S. s’est chargé de l’aspect administratif : numéro ISBN, dépôt des statuts de l’association, ce genre de choses assez carrées.
De mon côté, j’ai pris en charge tout l’aspect graphique du fanzine et ça, c’est vraiment LE truc qui me plait à fond avec le Mange-Disque. Concevoir les couvertures, illustrer les articles des uns et des autres, dessiner tous les titres, faire toute la mise en page, m’occuper du cadeau, mettre au point les affiches-promo… Ça prend un temps de malade, mais j’adore ça.

Chaque membre de la rédaction se prend donc en charge une rubrique, qu’il fait vivre au fil des numéros ?
FLF — Ce ne sont pas tant de “vraies” rubriques que des petites marottes personnelles que chacun défend de numéro en numéro.
Daniel, notre vétéran bien-aimé, nous fait revivre de l’intérieur ses concerts préférés, à grand renfort d’anecdotes qui sentent parfois un peu fort le vécu… Ça donne des chroniques de concert où il n’est quasiment pas question de musique, mais plutôt de l’art et la manière de planquer un appareil-photo dans un sac-à-dos rempli de linge sale pour tromper la vigilance du service d’ordre… Fred S. , dans l’édito comme dans ses articles, est le seul capable de caser des mots comme “corollaire” ou “éthéré”, une exigence littéraire compensée quelques pages plus loin par les familiarités langagières de Bruno M., pas du genre à tourner autour du pot.
Pour ma part, je me suis spécialisé dans le plébiscite de groupes pas très respectables, genre les Charlots, les Poppys, Niagara, Graziella de Michele, OMD, ou même… Johnny Hallyday (album “La Génération perdue”, un bon cru de 1969 !)… Des trucs que j’aime vraiment bien, mais qui ne jouissent pas d’une grande crédibilité-rock, c’est le moins qu’on puisse dire. Chaque numéro ou presque accorde une place à un article Reggae, signé par l’ami Jeff. On a aussi les interventions drolatiques de Bruno V. alias Placid Souplex, pour deux à quatre pages de dessins foutraques flirtant dangereusement (encore heureux !) avec le n’importe-quoi… On a aussi le poster central, une simple double-page, ne rêvons pas, chasse gardée de Daniel.

“On peut dire que les articles de chacun n’ont (presque) pas besoin d’être signés, tellement ils portent l’identité de leur rédacteur” — Fred Le Falher

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher
Les amis du Mange Disque (de gauche à droite) : Xavier Hup, Fred Le Falher, Fred Sérager, Jeff Vidal et Bruno Mosnier


Vous cultivez donc la liberté d’expression individuelle ?

FLF — On peut dire que les articles de chacun n’ont presque pas besoin d’être signés, tellement ils portent l’identité de leur rédacteur. Mais ça colle bien avec l’esprit du Mange-Disque : liberté de ton totale, comme au bon vieux temps des radios pirates… mais sur papier. On n’est pas organisés au point d’avoir des rubriques systématiques : on fonctionne essentiellement à l’envie, au coup de cœur, à l’initiative individuelle.
Les intervenants extérieurs, et les initiatives ou contributions qu’ils peuvent apporter, sont toujours les bienvenus : le cercle du Mange-Disque, tel un 45 tours élargi au 25 cm puis au 33 tours, est fait pour s’agrandir !

Un article signé Dominique A, une collaboration avec Renaud Monfourny, on ne se refuse rien au Mange-Disque ?!
FLF — Oui, nous sommes assez fier d’avoir eu Dominique A parmi nos rédacteurs (numéro 11), avec un article complètement inédit sur Bridget Saint-John. On l’avait rencontré pour une interview au Théâtre d’Aurillac en 2010, il avait particulièrement apprécié qu’on perpétue la tradition du fanzine-papier, du coup il nous avait promis un article : promesse tenue, merci M’sieur A !
Quand à Renaud Monfourny, lui aussi sensible au support imprimé, il nous a proposé de sélectionner des séries de 6 portraits par thématiques. Les photos étant carrées (avec la fameuse bordure noire du négatif, signature du maître), c’était parfait pour les pages du Mange-Disque. On n’est pas peu fiers d’avoir exhibé des Lou Reed (série “New-York”), Jesus & Mary Chain (“Dirty British”), Elliot Smith (“Mythes US”) et autres PJ Harvey (“Girls”) dans notre petit fanzine aurillacois… Pour l’anecdote, quand Monfourny est venu à Aurillac en 2012, dans son discours d’inauguration pour son expo, il a d’ailleurs dit “Oui, c’est vrai, je suis photographe aux Inrocks, mais enfin, je travaille surtout pour le Mange-Disque“, ah ah !

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher
Interview de Dominique A / Portfolios de portraits par Renaud Monfourny

Chaque couverture du Mange-Disque contient un élément glissé dans le décor qui évoque un 45 tours. Comment choisis-tu le thème de l’illustration de couverture ?
FLF — En fait, le thème de l’illustration n’a aucun rapport avec le contenu du sommaire. A l’inverse d’un magazine classique qui fait sa Une sur le sujet-vedette du numéro, la couv’ du Mange-Disque est un dessin complètement libre.
Le seul impératif que je me suis fixé, et qui est commun à toutes les couvertures, c’est d’intégrer un objet ou un élément de décor qui évoque le 45 tours. Une soucoupe volante (numéro 2), une crêpe (numéro 3), un morceau de glace sur la banquise (numéro 5), un gâteau d’anniversaire (numéro 10), le tracé du rond central sur un terrain de foot (numéro 11), le motif d’un bouclier viking (numéro 12)…
Faut pas croire, mais c’est assez compliqué à alimenter, comme concept ! Et maintenant, impossible de faire machine arrière, je dois me creuser la tête pour trouver des idées. Heureusement, notre rythme de parution, tout sauf stakhanoviste, me laisse du temps ! Mais il est déjà arrivé que tout soit prêt, sauf la couverture…

“En fait, le thème de l’illustration n’a aucun rapport avec le contenu du sommaire. A l’inverse d’un magazine classique qui fait sa Une sur le sujet-vedette du numéro, la couv’ du Mange-Disque est un dessin complètement libre” — Fred le Falher


Comment avez-vous distribué Le Mange-Disque ? Chez les disquaires, dans les bars ou les salles de concert, par abonnement ?

FLF — Dans la plus pure logique DIY, le Mange-Disque est en dépôt chez les disquaires indépendants : La Voix du Laser à Aurillac (fermé depuis quelques années, conjoncture oblige, argggh !), Spliff à Clermont, The Rev’ à Tulle… On a aussi élargi à quelques bars hautement fréquentables comme le Bikini à Clermont.
Mais on vend aussi directement aux copains, ou aux aficionados du Mange-Disque dans nos soirées-vinyles. Et aussi par correspondance pour nos lecteurs éloignés (mais oui, il y en a !). Bref, on se débrouille comme on peut pour écouler notre (modeste) stock, sachant qu’on ne tire qu’à 130 exemplaires, ce qui est assez dérisoire.

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher

GRAPHISME ET FANZINE

Parlons de toi maintenant. Quel est ton parcours ?
FLF — J’ai fait les Beaux-Arts : d’abord deux ans à Clermont-Ferrand, puis trois années en option Communication visuelle et audio-visuelle à St-Etienne parce que les Arts plastiques purs et durs, très peu pour moi. Mon projet de diplôme était construit autour de Chris Evans, un rockab’ stéphanois qui entrera dans la postérité pour avoir signé “Ma pin-up est une grosse truie”… Ensuite, deux ans d’objection pour éviter l’armée, et après il a bien fallu se mettre à bosser alors j’ai atterri à Aurillac pour être prof d’arts appliqués au lycée St-Géraud, un établissement assez génial dédié aux filières Arts appliqués et Arts graphiques. C’était en 1994, et je n’en suis jamais parti. Vingt-deux ans maintenant que j’enseigne les joies du graphisme à des élèves de Bac Pro Communication visuelle.

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher

Il se trouve qu’avec quelques collègues passionnés, on a fait le choix — complètement arbitraire — de travailler presque exclusivement autour de ce qu’on pourrait appeler la culture rock : l’image liée à la musique, ça reste quand même une obsession. On a mis en place toute une série de partenariat avec les structures du coin, notamment la Coopérative de Mai à Clermont ou les festivals Hibernarock ou Europavox, qui nous permettent de monter des projets super excitants avec nos artistes préférés de passage dans la région : de Daniel Darc à Heavy Trash en passant par Charlotte Gainsbourg, Katerine, Dominique A, Miossec, les anciens Bérus, et même Patti Smith (!). On a fait des super beaux boulots en graphisme, et vécu comme nos élèves des moments mémorables avec du beau monde.

En parallèle, j’exerce une petite activité de graphiste très indépendant, en dessinant des pochettes de disques pour des groupes aux noms croquignolets tel que Man Made Monster, La Position du Tireur Couché, The Plastic Invaders, The Balladurians…, des affiches de concert et de festivals rock, des visuels pour la Coopérative de Mai ou pour le Wakan Théâtre…
Le Mange-Disque, c’était l’occasion de se frotter à un environnement visuel complet : illustration, mise en page, typo, objets-promo, affiches pour annoncer les nouveaux numéros ou les soirées DJ… Presque un travail de Directeur artistique, mais en version Minus !

“Il se trouve qu’avec quelques collègues passionnés, on a fait le choix de travailler presque exclusivement autour de ce qu’on pourrait appeler la culture rock : l’image liée à la musique, ça reste quand même une obsession” — Fred Le Falher

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher

Quelles sont tes influences et tes références en terme de graphisme et d’illustrations ?
FLF — Je suis un gros fan de Serge Clerc, que j’ai découvert dans les pages du Rock&Folk du début des années 80, ou de Métal-Hurlant. Lycéen, j’ai passé des heures à recopier ses dessins, forcément ça marque. Ça reste un de mes dessinateurs préférés. J’aime aussi beaucoup Yves Chaland, un peu dans la même famille, la Ligne Claire, tout ça. Ça remonte à Hergé, que j’ai beaucoup scruté aussi. Globalement, je ne suis pas très attiré par les dessins hyper réalistes, minutieux, avec plein de petites hachures. J’aime bien Jijé, ceci dit, les Jerry Spring en noir et blanc, avec les fameux contre-jours, j’adore.
J’ai vraiment un faible pour les images très stylisées, et les gros aplats de couleurs. “Pravda la Survireuse”, le bouquin-culte de Guy Peelaert, trône dans mon salon. Les affiches de Saul Bass, j’en suis dingue : “The man with the golden arm”, “Anatomie d’un meurtre”, c’est super simple mais c’est génial. Tout le monde le copie allègrement, moi le premier, normal : c’est le meilleur. Je déteste viscéralement le jazz, par contre j’adore certains mecs qui ont signé des pochettes de disques démentes, notamment dans les années 40 et 50 : Jim Flora, Alex Steinwess, ou Reid Miles chez Blue Note, un pur graphiste, qui ne dessinait pas mais savait cadrer une photo et placer une typo dessus : chacune de ses pochettes est une leçon de mise en page.

“Les affiches de Saul Bass, j’en suis dingue : “The man with the golden arm”, “Anatomie d’un meurtre”, c’est super simple mais c’est génial. Tout le monde le copie allègrement, moi le premier, normal : c’est le meilleur” — Fred Le Falher

© Le Mange-Disque / Fred Le FalherDans les mecs plus contemporains, j’aime beaucoup Art Chantry, qui vient du graphisme punk : une bonne photocopieuse et une paire de ciseaux, ça peut suffire. Je suis aussi très marqué par tous ces américains qui font du gig-poster (Jeff Kleinsmith, Furturtle Print, Methane Studios…), il y a là-dedans une créativité tout azimut qui est vachement stimulante.
Plus proche de nous : j’adore Blexbolex (né dans le Cantal !) et ses bouquins toujours épatants ; j’ai suivi de près ce qu’on publié les éditions du Rouergue (basées à Rodez, pas loin non plus) quand Olivier Douzou était à la barre du secteur Jeunesse ; et en ce moment je suis très admiratif de ce que fait Alexandre Clérisse, un petit gars du coin exilé à Angoulême : son “Eté Diabolik” est un petit chef-d’œuvre, chaque page mérite qu’on s’y arrête. Je peux citer aussi des découvertes assez récentes : Jean Mosambi ou Marcel Bontempi, des mecs qui font des pochettes de disques et pas mal de sérigraphies dans un style très sixtie’s imprégné de cartoon, vraiment chouette.
En fait, chaque jour je peux être émerveillé par une affiche, une pochette de disque, un livre pour gamin… Je suis tout le temps en train de récupérer des flyers, des brochures, des magazines, des tas de trucs que j’entasse dans des cartons… C’est un peu compulsif. Heureusement, j’ai la chance d’avoir une grande baraque, avec un vaste grenier… et aussi une meuf compréhensive !

Comment organises-tu ton travail de graphiste sur le fanzine ?
FLF — A la base, je ne suis pas quelqu’un de très organisé… Sur le fanzine, je me fais violence : je dois être un peu méthodique parce que 60 pages à organiser, ça ne peut pas s’improviser. Pour ne pas être débordé, je gère les articles au fur et à mesure qu’ils arrivent.
La confection d’un numéro entier peut prendre plusieurs mois, du coup, parce que tant que j’ai du pain sur la planche, je laisse les copains m’envoyer les articles à leur rythme. Moi le premier, je suis assez lent à écrire (surtout quand je me lance sur un article fleuve à propos de Niagara !). Le truc très long et très chiant, aussi, c’est de lire tous les articles envoyés pour corriger les fautes d’orthographe et typographiques : j’essaie d’être le plus rigoureux possible avec ça, fanzine ou pas c’est une exigence qui me parait utile.
Côté maquette, je fais en sorte que tout le journal fonctionne par double-page : un article va occuper deux, quatre, six ou huit pages, jamais de chiffre impair. Je répartis le texte dans des colonnes, toujours en corps 9, et selon le volume qu’il occupe, j’évalue ce qui me reste de place pour faire ma petite garniture à moi : le titre et les images. Ce que je préfère, c’est les articles un peu longs parce que sur la première double-page, je me fais plaisir : gros titre, grosse illustration. Les lettres dessinées du titre, ça fait vraiment partie de l’identité visuelle du Mange-Disque.

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher

“Gros titre, grosse illustration. Les lettres dessinées du titre, ça fait vraiment partie de l’identité visuelle du Mange-Disque. La somme de contraintes créé le style, au bout du compte, et ça j’aime bien, comme principe” — Fred Le Falher

Il faut savoir que je fais tout sur le logiciel X-Press, qui n’est pas du tout un logiciel de dessin mais de mise en page. Sauf que même pour faire de la mise en page, plus personne ou presque n’utilise X-Press, c’est In Design qui a pris le relais. Illustrator, je ne connais pas et je refuse d’apprendre à travailler dessus, presque par principe. C’est aussi de la flemme, évidemment, parce que je ne suis pas du tout sensible à la technologie.
Je dessine sur un écran parce que c’est super pratique, mais je suis venu à la PAO sur le tard, un peu à contrecœur. Aux Beaux-arts, par exemple, j’étais un fervent adepte du tout-manuel, je détestais les ordinateurs.

Aujourd’hui, je dessine avec une souris mais pour autant, je reste un vrai nul en PAO, et je ne ressens pas du tout le besoin de progresser. Paradoxalement, c’est devenu une petite spécificité que je cultive : je dessine sur un logiciel qui n’est pas fait pour ça. Et bizarrement, dessiner sur X-Press, ça me plait vraiment. Pourtant, c’est hyper contraignant : il faut tracer des polygones fermés pour pouvoir les remplir d’une couleur ; on ne peut quasiment pas tracer de courbes fluides ; il n’y a pas de calques comme sur la fameuse “suite Adobe” mais ça c’est pas grave parce que les calques, je n’y ai jamais rien pigé. Tout ça m’oblige à adopter un dessin un peu schématique, plutôt anguleux, dans les illustrations comme dans les titres, ce qui rejoint les esthétiques stylisées que j’affectionne, ce côté un peu cartoon, genre Hannah Barbera… Non seulement je m’en accommode, mais j’y trouve mon compte. Mieux que ça : j’en rajoute. Par exemple, à l’intérieur du Mange-Disque où j’ai carte blanche, je m’impose une autre règle stricte : du noir, du blanc, et une seule et même valeur de gris, toujours en aplat.

© Le Mange-Disque / Fred Le FalherLa somme de contraintes créé le style, au bout du compte, et ça j’aime bien, comme principe. Ceci dit, il n’y a pas que des dessins dans le Mange-Disque : on essaie aussi d’accorder une belle place à la photo, et ça fait du bien d’alterner les deux, selon les articles. Ça rythme la lecture. On a notre fameux Daniel qui pratique la photo de concert en pur amateur depuis quarante ans, et la double-page centrale lui est (quasiment) toujours réservée. Mais on a aussi eu les portraits de Renaud Monfourny, qui me permettait de me fantasmer de temps en temps en maquettiste des Inrocks-mensuel… J’essaie de ne pas utiliser d’images chopées sur internet ou scannées sur un bouquin mais je dois reconnaître que j’ai eu recours plusieurs fois à ces solutions de facilité. Nobody’s perfect, hein…
L’étape finale, quand les 60 pages sont remplies, c’est de répartir tout ça de façon équilibrée : j’alterne articles longs (6 ou 8 pages) et articles courts (une double-page), articles plutôt sérieux et article marrants, dessins et photos… Faut pas croire mais c’est assez conséquent, tout ça, comme boulot. A une époque, on sortait trois numéros par an et franchement, je ne sais pas comment on faisait !

DU FANZINE AU COLLECTIF DJ…

Le Mange-Disque, c’est aussi des soirées DJ dans les bars d’Aurillac ?
FLF — Oui, au départ, on a commencé par organiser des soirées dans les bars d’Aurillac pour chaque sortie de numéro.
On passait des disques (vinyles exclusivement), on en profitait pour vendre quelques numéros, on faisait la bringue, c’était chouette.
Et petit à petit (assez rapidement, en fait), on s’est retrouvés à être sollicités pour animer des soirées dans les mêmes bars, ou ailleurs, parce que forcément, des mecs qui ne passent que des 45 tours à Aurillac, il n’y en avait pas des masses. Surtout, on a toujours fait ça en se marrant et en faisant marrer les gens : on passe un peu tout et n’importe quoi, plein de vieux tubes, des trucs des années 80, des hymnes pop, parfois même de la bonne vieille varièt’, des trucs que tout le monde connait et qu’on peut brailler à tue-tête, sans hiérarchie, sans snobisme (des fois on passe vraiment des trucs très limite, mais on s’en fout). Ça va de Plastic Bertrand à Nirvana en passant par AC-DC, les Poppys, The Clash, Cure, Sheila, les Calamités, les Soup Dragons, Deee-Lite, Eric Morena (Oh mon Bâteau), Orchestral Manœuvre, Taxi Girl, les Bérus, Niagara, Gotainer, des musiques de film, bref, c’est un peu n’importe quoi mais on se marre bien.
Du coup, aujourd’hui les gens ont un peu oublié qu’à la base, le Mange-Disque c’est un fanzine. On est devenus un collectif de DJ plus tout jeunes et passablement agités, qui dansent comme des tarés, grimpent sur les tables pour faire du Air-guitar sur Highway to Hell, et se font payer en bières… Bah, on a l’image qu’on mérite !

© Le Mange-Disque / Fred Le Falher
Le Mange-Disque à la Route du Rock en 2012. De gauche à droite : Bruno Verger (aka Placid Souplex), Jeff Vidal, Bruno Mosnier, Fred Le Falher…


En sommeil depuis 2013, le Mange-Disque est de retour ?

FLF — Oui, car c’est une activité qui me manque vraiment, en fait. C’est pour ça que je suis en train de relancer tout le monde pour qu’on refasse un numéro, après 3 années de sommeil …
La faute au boulot, à la vie de famille (on est tous papas), à l’enthousiasme qui faiblit aussi, évidemment… Mais merde, je me dis que c’est trop con de s’être laissés endormir, et qu’il suffit de s’y remettre pour retrouver l’énergie du début. Les groupes de rock se reforment, Les Objets sont réédités (!!!), y’a pas de raison pour que les rédacteurs de fanzine se ramolissent. The show must go on !!! Yeaaaaaaaah !!!

Pour information, pour le prochain numéro “Le Retour du Mange-Disque”, on cherche des nouvelles “plumes”, alors à bon entendeur… !


Fred Le Falher
Septembre 2016
Iconographie © Le Mange-Disque / Fred Le Falher


Plus d’informations sur Le Mange-Disque
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