AU DÉBUT
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Quels sont tes premiers souvenirs musicaux et/ou (photo)graphiques ? Quelle(s) image(s) en gardes-tu ?
Christophe — J’ai grandi en parcourant, grâce à mon père qui était publiciste, la revue internationale Graphis (notamment les versions annuelles). Mais c’est l’esthétique punk, puis post punk, qui m’a beaucoup séduite par sa radicalité et son urgence. C’est le premier mouvement, pour ma génération, qui imbriquait la démarche graphique et musicale. (Bazooka, Manchester, Jamie Reid…). La profusion de singles qui sortaient à ce moment-là, provoquait une émulation, une envie de participer, bien que trop jeune pour cela.
“C’est l’esthétique punk, puis post punk, qui m’a beaucoup séduite par sa radicalité et son urgence”
Ya t’il des liens entre ton parcours graphique et ta passion pour la musique ? Est-ce une démarche volontaire ou le fruit du hasard des rencontres ?
Christophe — Très rapidement, j’ai voulu m’exprimer en liant les deux disciplines. N’étant pas doué pour le solfège, il était préférable que j’aborde le graphisme en m’inspirant de la musique !
Mon frère musicien, ayant lui, créé le groupe « Les Freluquets », naturellement, j’ai commencé à élaborer les visuels associés, tout en apprenant les techniques aux Beaux-Arts.
GRAPHISME ET MUSIQUE
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Certains mouvements musicaux ont accordés une place essentielle à l’image et au graphisme. Que penses-tu de cet aspect “visuel” de la musique ?
Christophe — J’ai toujours adoré quand un label ou un mouvement développait une vision artistique globale. Factory, Postcards, plus tard Mowax m’ont beaucoup inspiré. ECM est un très bel exemple de direction artistique.
“Mon approche a toujours été de lier mes aspirations artistiques et l’univers des musiciens ou chanteur que l’on doit accompagner”
Que penses-tu du « retour » en force du vinyle face à la dématérialisation de la musique et de sa distribution ?
Christophe — L’attrait du vinyl, pour le travail de gens comme moi, permet de sortir du format CD ou numérique, de soigner les détails, jouer sur plusieurs niveaux de lecture. La vente de vinyl reste quand même un marché de niche, mais poser un disque sur une platine est un geste qui amène une solennité, du recueillement que l’on ne trouve pas avec un iPhone par exemple.
ARTWORK
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En tant que graphiste, quelle importance accordes-tu à une pochette de disque ? Permet-elle d’ajouter une “autre” dimension à la musique ?
Christophe — J’accorde une grande importance à l’élaboration d’une pochette de disque. Mon approche a toujours été de lier mes aspirations artistiques et l’univers des musiciens ou chanteur que l’on doit accompagner, il s’agit de susciter la curiosité, d’informer sur ce que l’on va trouver derrière la pochette, le visuel étant comme une carte de visite pour pénétrer un univers !
Quelles sont tes attentes vis à vis du musicien ou du groupe avec lequel tu collabores sur une pochette ?
Christophe — La concertation est importante, fixer un cadre pour s’exprimer, elle permet de savoir dans quelle direction aller, si l’on doit recourir à une prise de vue ou bien une illustration. Tous les cas sont particuliers, ainsi que les budgets. Le style musical détermine la tendance du projet. Quelquefois des artistes suggèrent des collaborateurs avec qui ils sont à l’aise, mais si nous pouvons maîtriser toutes les étapes de la création, c’est préférable, par souci d’homogénéité, ceci dit, quelquefois les accidents de parcours, comme des «photos ratées», peuvent amener de bonne surprises.
“Même une pochette qui a tout pour être hideuse peut avoir de l’impact. Car c’est la vision instantanée, émotionnelle qui prédomine le jugement”
Un musicien, un groupe ou un label doivent-il avoir un univers visuel et graphique qui leur est propre ?
Christophe — Chaque artiste a un univers personnel, qui évolue selon ses centres d’intérêts, ses impulsions.
En ce qui concerne les labels, je préfère les maisons de disques avec une forte identité. C’est un gage de qualité pour les mélomanes, mais cela peut être réducteur car les pochettes peuvent devenir standardisées, et donc devenir associées à un seul style musical… La complexité est de rendre la nouvelle référence homogène par rapport aux précédentes signatures tout en gardant sa singularité.
Quels sont le ou les éléments (images, typographies, message…) qui font une bonne pochette ?
Christophe — Il n’y a pas de règles esthétiques, chaque cas est particulier, cela peut être un effet graphique, ou bien un choix typographique, la combinaison de plusieurs choses, c’est une impression générale qui amène le spectateur a éprouver une sensation devant un visuel. Même une pochette qui a tout pour être hideuse peut avoir de l’impact. Car c’est la vision instantanée, émotionnelle qui prédomine le jugement.
HALL OF FAME
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Ton Top 5 des plus belles pochettes ?
Television « Marquee Moon » 1977 / Stinky Toys « 2ème album » 1979 / Joy Division « Unknow Pleasures » 1979 / T Rex « Electric Warrior » 1971 / Kraftwerk « Autobahn » (1974)… sans ordre de préférence.
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Christophe Lavergne
Janvier 2017
Plus d’informations sur Christophe Lavergne / Restez Vivants ! :
www.restezvivants.com
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Le clip video “Punk! Punk! Punk !” de Country Club est réalisé par Restez Vivants ! Il a été publié à l’occasion des 40 ans du mouvement Punk, et contient près de 200 pochettes de disques créées avant 1980, qui ont été revisitées en animation.