Orouni

My essentials for Stereographics © Orouni

LES ESSENTIELS D’OROUNI

Ma guitare classique est à l’origine de mon activité musicale : si ma mère ne me l’avait pas confiée, je n’aurais peut-être jamais composé de chansons. Aujourd’hui, je n’ai pas toujours besoin d’elle pour imaginer des mélodies, mais c’est vers elle que je reviens lorsqu’il s’agit de chercher des précisions mélodiques et harmoniques. Et comme l’instrument est peint (par ma famille et moi), il illustre bien l’interaction qui existe dans mon esprit entre musique et arts visuels.

Pour continuer à explorer le lien entre histoire personnelle et parcours musical, mon synthé (que mes parents m’ont offert lorsqu’ils se sont aperçus que j’étais diplômé du baccalauréat) me suit depuis assez longtemps. On peut l’entendre sur tous mes albums, pour l’instant. Si certains l’apprécient, d’autres méprisent un peu ce modèle, qui n’est pas du tout à la mode. Mais je m’en fiche. Il permet d’enregistrer assez rapidement des démos plutôt poussées, il est donc un excellent complément de mes guitares.

Le deuxième clavier essentiel pour moi est celui de mon ordinateur. En quelques années, de nombreuses actions qui auparavant consistaient à aller dans une salle de cinéma, louer un studio d’enregistrement, écouter de la musique sur une chaîne ou sortir papier à lettre et stylo à plume ont pu être remplacées par une seule : être devant un ordinateur (souvent avec un casque) pour regarder un film, enregistrer de la musique, en écouter et taper des emails. Je vais toujours au cinéma et en studio, mais aujourd’hui, une partie importante de mon activité liée à la musique s’effectue de manière informatique. L’avantage est qu’on gagne en autonomie, mais l’inconvénient est que les situations sont peu variées.
(J’en profite pour indiquer que la touche espace de ce clavier est cassée, et j’ai justement regardé des tutoriels pour la réparer (vive l’autonomie) mais je n’y suis pas parvenu, donc si quelqu’un dispose de cette compétence, qu’il/elle me contacte.)

Quand j’en ai assez de faire de la musique sur mon ordinateur, je sors en prenant mon appareil photo. Je n’ai aucune technique, je pratique en amateur et publie des sélections sur mon compte Flickr. J’aime beaucoup ça, et parfois, je me demande si je ne voyage pas uniquement pour prendre des photos. C’est le sujet de la chanson Kalimbalism. Je ne peux pas m’empêcher de m’approprier une partie de ce que je vois et que j’aime, afin que cela fasse aussi partie de moi et que je puisse éventuellement en faire quelque chose plus tard. Le vinyle de Grand Tour comporte d’ailleurs un livret de douze photos A4, et pendant les mois qui ont précédé la sortie de cet album, j’ai alimenté un blog de correspondances photographiques grâce à des images rapportées de mes voyages. Pour la petite histoire, après m’être fait voler un appareil photo en Afrique du Sud, lorsque j’ai voulu immédiatement en racheter un sur place, il ne restait en magasin que ce modèle rose métallisé (coloris que je n’aurais pas spontanément privilégié). L’agression qui m’a poussé à acquérir cet engin a inspiré les paroles de Firearms.

La compilation African Pearls – Congo 70 – Rumba Rock représente mon amour insatiable de la musique africaine, en particulier du pays sus-cité, Afrique du Sud, Éthiopie, Ghana, Guinée, Mali, Nigéria et Sénégal. Je l’apprécie d’abord en tant qu’auditeur, et ensuite, à l’instar de la photo, j’essaie de m’en inspirer dans ma propre production, de différentes façons.

Enfin, j’ai sélectionné Le Rouge et le Noir de Stendhal (mais cela aurait pu être Anna Karénine de Tolstoï ou Une maison de poupée d’Ibsen) car l’embêtant, quand on compose des chansons, c’est qu’il faut écrire des paroles. Lire permet donc de se frotter à tout cela, dans un premier temps par pur plaisir en tant que simple lecteur (et il faut bien occuper tous ces voyages en train), puis afin de déterminer si on peut en prendre de la graine. J’ai choisi Stendhal ici pour le syndrome auquel il a donné son nom (j’avais d’ailleurs appelé mon blog de récits de voyages ainsi) : certaines personnes commencent à défaillir lorsqu’elles sont exposées à une surcharge de beauté.


Orouni
Janvier 2016

Plus d’informations sur Orouni :
www.orouni.net
www.facebook.com/Orouni
My Favorite Things (A Découvrir Absolument)

Je suis une île…

Yann Tiersen - Eusa - Porz Goret

Tout au long de sa carrière, Yann Tiersen n’a cessé de se réinventer, de remettre en question sa musique, à travers de nouvelles collaborations et de nouvelles rencontres.

Avec la discrétion qui le caractérise, il publie ces jours-ci un livre de partitions pour piano solo, baptisé Eusa (Ouessant en breton). Ce livre est constitué de dix titres inédits, qui portent chacun le nom d’un lieu de l’île qu’il l’a inspiré. Chaque titre est géolocalisé par ses coordonnées GPS et illustré par une série de photographies d’Emilie Quinquis.

Comme l’explique Yann Tiersen : “Ouessant est bien plus que ma “maison”, c’est également une part de moi-même. Avec Eusa, j’ai voulu réalisé une cartographie sonore et musicale de l’île et par extension, une cartographie de ma personnalité.
J’ai d’abord commencé par sélectionner dix sites sur l’île dont j’ai réalisé un enregistrement d’ambiance sonore naturelle. J’ai ensuite composé les dix partitions, qui portent chacune le nom d’un des dix lieux.
Puis, j’ai décidé que je ne réaliserai pas d’enregistrements audio de ces dix titres, mais que les ambiances sonores qui les ont inspirées seraient inclus avec le livre de partitions.
Il sera ainsi possible pour chacun de s’immerger dans l’environnement sonore d’Ouessant et d’interpréter la partition accompagnée de l’ambiance naturelle qu’il l’a inspirée. Les sons de l’île sont au moins aussi importants pour moi que les notes sur les partitions.”

Ce livre est donc une sorte d’expérience interactive entre Yann Tiersen, son public — du moins ceux qui ont des talents de musiciens leur permettant de lire et de jouer une partition — et l’environnement sonore naturel de l’île d’Ouessant.

Une bien belle idée !

L’annonce de la sortie du livre est accompagnée par la diffusion d’un très beau clip vidéo tourné sur l’île, où Yann Tiersen interprète lui-même “Porz Goret”, l’un des dix titres d’Eusa. Il entamera à partir de Mai prochain une tournée en solo où il interprètera Eusa dans son intégralité.

Yann Tiersen projette également, de composer et d’enregistrer son prochain album uniquement en extérieur, dans différents milieux naturels à travers le monde afin “de laisser la magie naturelle et sauvage des lieux pénétrer la musique”. Vous pourrez suivre ici l’évolution de ce projet baptisé “Album #9” .

 

Yann Tiersen - Eusa
Yann Tiersen – Eusa

Le livre Eusa est disponible sur le site officiel de Yann Tiersen

Les partitions de chaque titre sont disponibles ici
(une écoute interactive est possible)

Les dix ambiances qui ont inspirées les morceaux peuvent être écoutées ici

 

 

Sylvain B.

My essentials for Stereographics © Sylvain B.

LES ESSENTIELS DE SYLVAIN B.

Commençons donc par l’essentiel : ma guitare. Cela paraît basique, un peu post-ado, mais elle me suit partout ! Celle-ci ou une autre (qui prend maintenant la poussière) partagent autant ma vie professionnelle que ma passion avec ALGO.
Je la promène de concerts en concerts, elle a pris le RER des centaines de fois, elle se promène à chaque période de vacances dans le Sud Ouest pour manger un peu de canard et bien sûr, elle reprend sa place dans ma petite pièce musique où elle me sert à composer et à travailler pour les cours.
J’en joue depuis le collège, de Oasis à The Auteurs, toutes les reprises y sont passées : mais je ne pensais pas faire de la musique un métier à part entière ! La musique m’a accompagné dans les différents cursus universitaires que j’ai “tentés” jusqu’à celui de Musicologie… Je ne pensais rien de trouver de spécial là-bas, ne pensais pas être à la hauteur, être capable ensuite de faire de la musique un métier, mais la musique m’a rattrapé … ah ah !

De la guitare, passons à ce fameux capodastre, acheté quelques euros dans un magasin très célèbre de la porte de la Villette… Il est toujours au fond de mon sac, au cas où je perdrai celui qui me sert en classe. Eh oui ! C’est un peu comme mon deuxième trousseau de clefs.

Les Yashica Mat 124 et Polaroid SX70 : comme mon ami Eric Auv, mon “frère” qui m’accompagne dans l’aventure ALGO depuis le début, on adore tout ce qui est vintage, authentique, comme la photographie argentique et le polaroid. Il est plus que doué et fait parfois des expos, moi je suis un amateur “averti”. On a plein d’appareils argentiques et on shoote toute l’année quand le temps nous le permet. Je range ensuite tous mes clichés et autres polas dans de grands albums photos, à l’ancienne. J’adore les regarder mais aussi les montrer ! C’est un peu une deuxième passion. ALGO m’a permis aussi de rencontrer d’autres passionnés de photos comme Séverin du groupe Parlor Snakes ou encore Louis de Soul Kitchen.

Mon téléphone portable : on est passionné de vintage mais on reste tout le temps ultra-connecté. Mon portable me lâche rarement, c’est un gros défaut, mais il me permet dans n’importe quel endroit de gérer le boulot et ALGO à distance. D’où “l’intérêt” d’une phablette pour la qualité de l’image et la rapidité. Du coup, il remplace parfois mon ordinateur. Cela me change de mon premier téléphone Alcatel OLA. Si, si…. Tout le monde s’en rappelle !

Ma montre et mon agenda : bon, ok… Je suis hyper organisé et obsédé par le temps qui passe et toutes les choses que j’ai à faire pour la musique et le boulot. Du coup, semaine par semaine, j’organise mes journées de manière millimétrée. Cela ne m’empêche pas de dormir le mercredi et le week-end jusqu’à midi… ah ah !

Les baguettes et l’arôme Maggi : ayant des origines asiatiques, j’ai comme héritage de ma maman un goût très prononcé pour la cuisine. Lassé des pâtes carbonara et des kebabs de fin de soirée quand j’étais étudiant, je me suis mis à reprendre des recettes laotiennes ou vietnamiennes de ma mère en suivant ce qu’elle m’avait écrit mais surtout en reproduisant des gestes que j’avais vus depuis tout petit : en effet, j’étais tout le temps en cuisine avec elle, tel un grand gourmand, pour ne pas rater une miette des plats qui embaument tous les jours la maison familiale. Bref, je m’y suis mis et je crois que je m’en sors pas trop mal. Il faudra demander cela à ma copine et mes amis.
Eh Pascal, tu as aimé mon Bo-Bun ? 🙂 (NDL: absolument excellent mister B. !)

“If You’re Feeling Sinister” de Belle and Sebastian : L’un des meilleurs albums de tous les temps que j’ai découvert grâce à mon ami Julien, aka Pépé, qui m’a fait notamment découvrir The Auteurs ou encore plein d’autres merveilles. C’est aussi un peu grâce à lui que je me suis tourné vers la musique, et surtout la pop. On était dans le même groupe des années et on a partagé beaucoup sur le plan personnel. Il fait en quelque sorte partie de ma famille.

Mon T-shirt L.A 84 : étant un grand fan d’Elliot Smith, je me suis mis à chiner sur le net comment me procurer ce fameux vêtement en pochette de FIGURE 8. J’ai réussi, je le mets de temps en temps et ça me fait rire. J’ai l’impression d’être un fan de Maiden avec un t-shirt bizarre.

The Misunderstanding” d’ALGO : je ne vais pas être redondant, une bonne partie de ma vie tourne autour d’ALGO et je suis très fier de cet EP. C’est un condensé de beaucoup de choses, en 5 chansons, avec beaucoup de monde et d’amour. What else?

Une pinte ! Loin de moi l’idée d’adhérer au rock’n’roll et à tous les fantasmes qui en découlent… Je préfère écouter de la bonne musique sur un canapé en buvant une lager. Toi aussi ?


Sylvain B.
Septembre 2015

Plus d’informations sur ALGO et Sylvain B. :
www.facebook.com/wearealgo/
wearealgo.bandcamp.com/

My essentials for Stereographics by Sylvain B.
© Sylvain B. / All rights reserved / Reproduction prohibited without permission of the author.

Le SuperHomard

Le Super Homard "Maple Key" — Artwork © Cyril Pooley
The Strawberry Smell (Cyril et Christophe / 1993)
The Strawberry Smell (Cyril et Christophe / 1993)

AU DÉBUT
Messieurs, je crois que vous êtes tous les deux musiciens ?
Cyril Alors j’me présente je m’appelle Henri, heu Cyril, je suis graphiste professionnellement depuis 1989 et je joue de la musique, plus qu’un hobby, avec Christophe depuis…1989, autant dire qu’on ne peut pas parler de collaboration mais d’osmose.
Christophe Pareil, sauf que je m’appelle Christophe et que je ne suis pas encore graphiste.

Quels sont vos premiers souvenirs musicaux et/ou graphiques ?
Cyril Pour moi, c’est forcément le flyer du premier concert des Strawberry Smell (le 1er groupe que nous avons crée ensemble), et donc la première identité typo(graphique) du groupe.
Christophe On a appris à jouer de la musique ensemble quand on était encore des ados, on a aussi découvert beaucoup de disques, de pochettes de disques et une partie de l’univers visuel de la musique pop ensemble.

Est-ce un point de départ dans vos parcours ?
Cyril Certainement, comme tout à commencé en même temps, graphiste au sein d’un groupe de rock pop psychédélique, mon travail a toujours été influencé par la musique, et également par les pochettes des groupes qu’on reprenait au début avant d’avoir nos propres compos et notre propre identité graphique.

Cyril, l’association de la musique et du graphisme, est-elle une démarche volontaire ou le fruit du hasard de tes rencontres ?
Cyril Par la force des choses, donc plutôt le hasard des rencontres que ce soit dans la musique avec mes vieux potes du groupe (je ne citerais pas leur âge) ou mon premier stage dans le graphisme, où Christian A., le patron, m’a offert un emploi dans son bureau de stylisme et m’a donné ma chance dans un métier qui est toujours le mien.

“Mon travail a toujours été influencé par la musique, et également par les pochettes des groupes qu’on reprenait au début avant d’avoir nos propres compos et notre propre identité graphique” — Cyril

Le SuperHomard "Maple Key" — Artwork © Cyril Pooley
Le SuperHomard “Maple Key” — Artwork © Cyril Pooley

GRAPHISME ET MUSIQUE

Certains mouvements musicaux ont accordé une place essentielle à l’image et au graphisme. Avez-vous toujours fait attention à cet aspect visuel dans votre propre parcours ?
Cyril De toute évidence, c’est indissociable. La pochette, c’est ce qui te donne envie de découvrir l’univers musical qui se cache derrière. Mais c’est comme une étiquette de vin, il y a des albums géniaux avec des pochettes moches et inversement, une belle étiquette et de la piquette dedans.
Et puis l’imagerie d’un groupe, c’est aussi les clips vidéo, on en fait régulièrement avec Christophe pour nos divers projets.

La pochette est-elle l’empreinte du disque qu’elle contient ?
Cyril — Je pense qu’il faut qu’elle le soit, une extension sensorielle, les yeux qui manquent aux oreilles. Et ce n’est pas toujours le cas, les Beatles par ex., on aime Sergent Pepper pour la pochette et la musique, alors que l’album blanc, il reste juste la musique, hahaha.

“La pochette, c’est ce qui te donne envie de découvrir l’univers musical qui se cache derrière (…) une extension sensorielle, les yeux qui manquent aux oreilles” — Cyril

En tant que musicien et graphiste, quelle importance accordez-vous à une pochette de disque ?
Cyril + Christophe
(à l’unisson) — Essentiel !!!

Que pensez-vous du “retour” en force du vinyle, face à la dématérialisation de la musique et de sa distribution ?
Cyril Ha bon ? c’est encore le retour en force du vinyle, on entend ça tout les 3 ans, on en fabrique certes mais est ce que les gens les achètent ? Nous, on a toujours été des adeptes de la secte vinyle donc c’est plutôt bien que ça revienne en force, et c’est plus sympa comme surface visuelle
Christophe On fait des vinyles depuis nos débuts en fait ! On a toujours été fans de pochettes cartonnées et colorées !

ARTWORK

Comment avez-vous envisagé cette nouvelle collaboration sur la pochette du Super Homard ?
Cyril
On l’a envisagé sous l’angle de l’apéro (angle droit), on discute autour d’un verre, Christophe avait envie d’un visuel assez minimaliste, Lorène (alias Kimi Kimoki), sa compagne qui est illustratrice, avait fait une veille d’affiche rétro japonaise et de couvertures de bouquins scientifiques, et on a tchatché autour de cet univers visuel un peu technologique-rétro-pop.
Christophe Je savais déjà pendant que je faisais le disque que Cyril en ferait la pochette. Même le nom de SuperHomard vient du nom du label/studio que nous avons créé ensemble avec des copains pour sortir certains disques de nos autres projets (Pony Taylor par exemple). Ce nom date aussi de l’époque des Strawberry Smell, il est tiré du nom d’une boite de nuit pop dans le film 60’s « Ne Nous Fâchons Pas » dont le thème musical a été le premier morceau que nous avons appris à jouer.

Pouvez-vous résumer l’intention du disque et de la pochette ? Le visuel principal, comment l’avez-vous construit ?
Cyril
J’ai proposé quelques pistes graphiques, re-apéro, puis on fait un mixe de deux pistes qui plaisait à Christophe, une hyper épuré avec seulement un motif vintage et une plus chargée (qui pour moi correspondait mieux à la musique assez sophistiquée du Superhomard), et Kimi a réalisé les illustrations additionnelles, pour habiller l’intérieur.

Illustration © Kimi Kimok / Artwork © Cyril Pooley
Illustration © Kimi Kimok / Artwork © Cyril Pooley

Cyril, selon toi, la pochette doit-elle être une véritable réflexion sur la mise en image de la musique où une démarche purement artistique ?
Cyril
Parfois l’un, parfois l’autre, parfois les 2 ensembles. Ca me plait bien parfois de faire des pochettes, par exemple pour des groupes purement sixties, qui s’inspirent gravement de l’univers visuel des pochettes sixties, des clichés type EP américain. Il y a beaucoup de groupes qui ont déjà une vision de l’ambiance qu’ils veulent sur leur pochette, ce sont des artistes aussi, ne l’oublions pas.
J’ai fait des pochettes de Death Metal, (si, si !), autant dire que les codes étaient imposés.

“Parfois je trouve que ça peut être bien si tous les groupes du label sont assez proches niveau style, comme chez le label Ghostbox de Julian House” — Christophe

Pensez-vous qu’un label doit avoir un univers visuel et graphique qui lui est propre ?
Cyril
Je dirais non, il me semble que c’est l’univers du groupe qui prime. Par contre, je suis un fan absolu (que Jimmy et Janis m’en soient témoin) du Fillmore Auditorium à San-Francisco où les graphistes résidents ont créé un univers visuel propre au lieu, au travers des posters des groupes qui y jouaient.
Christophe Parfois je trouve que ça peut être bien si tous les groupes du label sont assez proches niveau style, comme chez le label Ghostbox de Julian House (un graphiste designer anglais cultissime).

Christophe, quelles sont tes attentes vis à vis de la personne avec lequel tu collabores sur une pochette ? Un bon apéro ?
Christophe
Avec des cacahuètes, très important les cacahuètes ! Plus sérieusement, être sur la même longueur d’onde que le designer. Avec Cyril c’est comme quand on joue de la musique ensemble, on se connaît tellement bien qu’on a même plus besoin de se parler en fait !

Artworks by Cyril Pooley
Artworks by Cyril Pooley

HALL OF FAME

Quels sont le ou les éléments (images, typographies, message…) qui font une bonne pochette?
Cyril Pour moi, une belle photo et un bon choix typo suffisent souvent à faire une belle pochette.

 

LE TOP 5 (DES PLUS BELLES POCHETTES)

Cyril

The Strawberry Alarm Clock – Incense And Peppermints
The Who – Sell out
Cotton Comes to Harlem – B.O.F (toutes les pochettes des B.O de Blaxploitation en général, avec composition illustrée)
Cucumber – The French Job  (auto-promo, j’en suis fier, j’y ai mis mes trip(e)s)
Chicago – (pour la série complète de pochette déclinée sur la même base)

Disocrama_Top5_SuperHomard
Christophe
Je rajouterai aussi :
The Strawberry Smell – Odorama  (auto promo bis mais une super belle pochette quand même !)
Stereolab – Dots and loops
The Music Machine – Turn On


Christophe Vaillant et Cyril Pooley
Novembre 2015

Plus d’informations sur l’univers de Christophe et de Cyril :
www.facebook.com/lesuperhomard
“Ne nous fâchons pas avec Le SuperHomard” (Soul Kitchen)
“Pooley, Cucumber, Cyril Jean” (Ave The Sound)

« Maple Key » —Le Super Homard (2015)

Grisbi

Grisbi / Photographie © monsieurj

AU DÉBUT

Quel est votre premier souvenir “graphique” à tous les deux ?
Natasha Une reproduction du Jardin des Délices de Jérôme Bosch qui trônait au-dessus de l’orgue du salon. Un univers étrange et fascinant, fourmillant de détails, qui m’a obsédé toute mon enfance. À la même époque, j’ai pas mal feuilleté les magazines Géo de mes parents. Leurs reportages photo m’ont aussi profondément marqués.
Antoine Les hommes volants de Jean-Michel Folon, le fameux générique d’Antenne 2.

Et votre premier souvenir “musical” ?
Antoine — Pink Floyd “The Wall”, la musicassette de mes parents (avec plastique bleu !?) doit être bien rincée à l’heure qu’il est…
Natasha Si on exclut ma première demande officielle d’achat de disque (“Chante” des Forbans…), et j’avoue que ça m’arrange, je pense instantanément à “Lost Weekend” de Lloyd Cole And The Commotions. C’est probablement le morceau que j’ai le plus écouté en boucle avant mes 10 ans. J’étais amoureuse de la voix et de la guitare, c’était super pour danser.

Les deux souvenirs sont-ils liés ?
Antoine  Pas vraiment, mais dans les deux cas, l’image et la musique sont indissociables, ils ne forment qu’une entité. L’intérieur de pochette de Pink Floyd “The Wall” m’a provoquée pas mal de cauchemars à 5 ans.
Natasha — Indirectement, oui. Mon père achetait tous les 45 tours qui sortaient à l’époque. Je passai des heures, le casque vissé sur les oreilles, à les écouter dans le salon, là où était accroché le dit tableau. J’ai donc pu le contempler longuement, bercée par le meilleur et le pire de la musique des années 1970-1980. Curieuse mixture…

“L’intérieur de pochette de Pink Floyd “The Wall” m’a provoquée pas mal de cauchemars à 5 ans” — Antoine

Photographie © Jean-Christophe Londe (aka monsieurj)

GRAPHISME ET MUSIQUE

Certains mouvements musicaux ont accordé une place essentielle à l’image et au graphisme. Y êtes-vous sensible ?
Antoine  Complètement. La période punk a été décisive en ce qui concerne l’évolution de l’imagerie et de la musique, puisque tout le monde devenait potentiellement un artiste. On a connu sensiblement la même chose avec la house, ses badges et consorts.
Natasha — Ma grande sœur était fan de hard-rock, donc oui j’ai été sensibilisée assez tôt à ce lien entre musique et graphisme… Toute considération esthétique mise à part, les zombies de Maiden, la fameuse pochette de Scorpions avec le chewing-gum collé sur la poitrine dont j’ai oublié le nom, ou les croix alignées de Master of Puppets (Metallica) sont des images marquantes.
A la simple vue d’une pochette, tu sais où tu mets les pieds, comme avec l’imagerie punk dont l’esthétique est aussi très codifiée, avec des typos destroy très étudiées. Au final, ces codes, cette iconographie, c’est une manière pour les groupes de revendiquer ou d’affirmer leur appartenance à un mouvement et d’être instantanément identifiés par un public. C’est bien pratique mais le risque est de tomber dans les clichés. J’ai tendance à préférer les outsiders qui brouillent les pistes.

En tant que musicien, quelle importance et quel rôle accordez-vous à une pochette de disque ?
Natasha  La pochette a un rôle primordial. Avant même la musique, c’est le premier contact intime qu’on a avec un disque. C’est une porte d’entrée qu’on a envie de pousser ou pas. J’ai acheté de nombreux disques sur la foi de la pochette, simplement parce que le visuel était beau ou intrigant. Inversement, je suis peut-être passée à côté de très bons disques à cause d’une pochette ratée.
Antoine — La pochette « représente » la musique, elle en est l’ambassadeur. Elle signifie aussi parfois « Attention, ceci n’est pas pour tout le monde ».

“Le ressenti d’un graphiste sur la musique, les images qu’elle fait naître dans sa tête, c’est bien plus intéressant que de répondre à un cahier des charges” — Antoine

Selon vous, la pochette doit-elle être “simplement” représentative du disque qu’elle contient ou permet-elle d’ajouter une “autre” dimension à la musique ?
Natasha Elle ne doit pas être nécessairement représentative de la musique, je dirais même au contraire, mais elle conditionne indéniablement notre écoute.
Elle peut stimuler notre imaginaire en étant énigmatique (Houses of the Holy – Led Zeppelin). Elle peut s’effacer en jouant la neutralité ou le minimalisme (l’album blanc des Beatles, la banane de Warhol pour le Velvet) pour laisser place à l’essentiel, ou au contraire imposer une lecture en donnant beaucoup d’informations, en proposant une histoire.
Antoine Pour moi, elle n’a pas à être représentative, en tous cas pas nécessairement. “Atom Heart Mother” et sa vache est pour moi une référence en la matière. Le ressenti d’un graphiste sur la musique, les images qu’elle fait naître dans sa tête, c’est bien plus intéressant que de répondre à un cahier des charges.

Faites vous une différence entre une pochette vinyle et une pochette CD ?
Natasha La pochette vinyle l’emporte évidemment haut la main. J’adore cet objet et son format, 33t et 45t confondus. C’est un carré parfait qui vieillit en outre très bien. Je trouve ça beau une pochette qui a vécu, avec ses coins abîmés, ses déchirures, le nom de son propriétaire fièrement griffonné…
Elle révèle une relation très intime, une histoire d’amour ou de haine parfois. Une boîte cristal de CD rayée ne me raconte pas grand chose.
Antoine J’ai toujours eu du mal à ne pas écorner les pochettes de Cds en les glissant dans les boîtiers cristal, cette fameuse quatrième languette ;p
Je reste bien plus attaché au visuel des vinyles qu’à leur son, les craquements ça ne me manque pas du tout. Il y a une certaine perfection dans ce format 30*30.

“Je trouve ça beau une pochette qui a vécu, avec ses coins abîmés, ses déchirures, le nom de son propriétaire fièrement griffonné” — Natasha

Photographie © Jean-Christophe Londe (aka monsieurj)
ARTWORK

Comment envisagez-vous le travail sur une pochette ? Êtes-vous ouvert à l’apport et l’échange d’une collaboration graphique ?
Antoine Au moment d’enregistrer, je n’y prête aucune considération. C’est ce que l’ensemble des titres évoque en terme d’image qui est important, ça intervient dans un deuxième temps, tout en appartenant à l’œuvre dans sa totalité. Je détesterais réaliser les pochettes moi-même, si tant est que j’en avais les compétences. Ma vision reste musicale.
Natasha Jusqu’ici on a confié la réalisation de nos pochettes à des amis, graphiste ou photographe. On est finalement peu intervenu dessus. C’est assez marrant et instructif de voir ce qu’évoque ta musique chez les autres.
Aujourd’hui, j’ai envie de m’exprimer davantage sur l’aspect visuel. L’important étant de trouver le bon équilibre entre tes aspirations et la liberté d’action du graphiste. Une collaboration est et doit rester un échange.

Lorsque vous composez, avez-vous des images spécifiques en tête ?
Natasha J’ai tendance à penser qu’on se nourrit forcément d’images quand on écrit, quand on compose, mais je peux me tromper. En tout cas, je fonctionne comme ça. Les mots d’une chanson, les mélodies, sont la traduction des images qu’on a dans la tête ou dont on s’inspire (photo, tableau…) mais ce ne sont pas nécessairement celles qu’on imagine pour illustrer une pochette de disque.
Antoine Lorsqu’on a composé notre premier album « Playtime » (sic), on a abusé des dialogues de film, l’idée étant de faire naître un maximum d’images chez l’auditeur, de l’enfermer dans une bulle.
La plupart de mes idées musicales naissent d’images d’ailleurs, comme le final psychédélique de 2001 ou les scènes de plage de « Rêve de Singe » par exemple, des trucs oniriques.
Je préfère qu’on me suggère des images évoquées par la musique ; je suis d’ailleurs très satisfait du travail graphique de Marceau Boré (de Piano Chat) pour notre 1er album, l’image de ces deux personnages un peu anxieux gribouillés sur du papier froissé, ça nous représentait parfaitement, du moins tels qu’on l’était à l’époque. J’y vois mes propres doutes.

“Les mots d’une chanson, les mélodies, sont la traduction des images qu’on a dans la tête ou dont on s’inspire  mais ce ne sont pas nécessairement celles qu’on imagine pour illustrer une pochette de disque” — Natasha

Qu’attendez-vous de la personne (artiste, graphiste, photographe, etc..) avec laquelle vous travaillez sur une pochette ?
Natasha D’abord qu’il y prenne du plaisir et qu’il soit sensible à notre musique. Si c’est une contrainte, il n’en sortira rien de bon. Qu’il ose faire des propositions, radicales ou auxquelles on n’aurait pas pensé, tout en sachant être à l’écoute du groupe. Et puis, qu’il sache faire ce que je ne sais pas faire techniquement !
Antoine Qu’elle s’exprime, sans barrières. Comme nous en somme.

Dans votre discographie, avez-vous cherché à garder une identité graphique, une ligne directrice où pensez-vous que chaque disque doit ou peut avoir un univers visuel spécifique ?
Antoine — Ça dépend des jours ;p On peut vite se retrouver coincés dans une imagerie qui ne nous correspond plus à l’instant T, puisqu’on évolue tous. Ou alors il faut s’appeler The Smiths et avoir suffisamment de latitude. Et encore, leurs covers sont toutes interchangeables en réalité, elle ne servent pas forcement la musique qu’elles véhiculent. J’ai du mal avec les artistes monomaniaques de toute façon.
Natasha
Il n’y a aucun lien visuel entre le premier album de Grisbi (Playtime) et l’EP ‘Lillies Bordello qui a suivi. Pas forcément par choix délibéré, cela est lié à l’histoire du groupe, la volonté d’intégrer des amis dans le projet, la débrouille aussi…
Dans le premier cas, on a fait appel à un ami graphiste et musicien, Marceau Boré, qui a gribouillé un dessin dans le train et qu’on a gardé tel quel parce que la spontanéité de sa réalisation nous plaisait. On a fait le choix de la photo pour la pochette de l’EP qu’on a confiée à notre ami photographe Monsieurj. La pochette du prochain disque sera aussi très différente des autres. J’ai des envies plus affirmées aujourd’hui, des idées plus précises.

“La plupart de mes idées musicales naissent d’images d’ailleurs, comme le final psychédélique de 2001 ou les scènes de plage de « Rêve de Singe » par exemple, des trucs oniriques.” — Antoine

Photographie © Jean-Christophe Londe (aka monsieurj)

HALL OF FAME

Quelles sont la ou les pochettes qui font référence pour vous ?
Antoine
J’adore celle d’Actually des Pet Shop Boys, qui les représente des poches sous les yeux, en train de bailler, dans ce qu’on imagine être une séance de shooting promo. Elle raconte une histoire. Idem pour “Propaganda des Sparks.
Natasha Outre les incontournables pochettes des Smiths et de Kraftwerk que je vénère, il y a bien sûr celle, fascinante, d’ “Atom Heart Mother” de Pink Floyd. Avec mes sœurs, on demandait aux parents le disque de “la vache”. Cela en dit long sur l’efficacité imparable de ce visuel. Je leur ai piqué depuis et il est exposé chez moi comme une sainte relique. Ce choc visuel on l’a avec à peu près toutes les pochettes de Pink Floyd. Je pense à “Ummagumma” et “Animals” en particulier. J’en exclus la vilaine pochette de “The Endless River” qui évoque une parodie, un fake. C’est totalement raté.

LE TOP 5 (DES PLUS BELLES POCHETTES)

Natasha

The Man Machine – Kraftwerk
Movement – New Order
Animals – Pink Floyd
Goo – Sonic Youth
Histoire de Melody Nelson – Serge Gainsbourg
Discorama_Top5_Grisbi_Natasha
Antoine
XTC – Go
Depeche Mode – Music For The Masses
Broadcast – The Noise Made By People
New Order – Movement
Throbbing Gristle – 20 Jazz Funk Greats
Discorama_Top5_Grisbi_Antoine


Natasha Penot et Antoine Chaperon
Octobre 2015

Plus d’informations sur Grisbi :
www.facebook.com/Grisbi
www.elap-music.com


Toutes les photographies qui illustrent l’article sont de © Jean-Christophe Londe (aka monsieurj)

“Keep An Eye On You” —Grisbi (2015)

Pascal Blua

My essentials for Stereographics © Pascal Blua

LES ESSENTIELS DE PASCAL BLUA

Me voici donc en 20 objets.
1. Un exemplaire de ma collection de polos Penguin
2. My old Levis jacket
3. “Pacific Street” par The Pale Fountains, le disque qui a changé ma vie
4. These Boots Are Made For Walkin’
5. Woodframes par l’incroyable artisan lunetier Herrlicht
6. Apple addict
7. Badges Katerine “Je coupe le son” / “Et je remets le son” (l’histoire de ma vie)
8. Je prends des notes tout le temps…
9. Carte de visite (impression typographique)
10. My Design Mouse
11. CardBoy Cartridges Artoyz (CMYK)
12. Eau de Lourdes, un vieux souvenir famillial
13. Mon cartable jaune
14. Ma première montre américaine
15. “Les Beatles font l’intéressant” par Jean, un de mes livres de chevet
16. Je ne sais pas écrire avec autre chose (Tempo Paper Mate)
17. “The Violent Life and Death of Tim Lester Zimbo” par 49 Swimming Pools, le disque qui a aussi changé ma vie
18. “I want to be Matisse – Andy Warhol” (la vie est mal faite).
19. Apple addict (again)
20. “L’ABC” du métier par Massin, un autre de mes livres de chevet

Plus d’informations sur Pascal Blua
bluartwork.com

Photographie : monsieurj
Stylisme : 3.14


Pascal Blua
Octobre 2015

My essentials for Stereographics by Pascal Blua
© Pascal Blua / All rights reserved / Reproduction prohibited without permission of the author.

A Tale of Two Cities

"A tale of Two Cities" - Sérigraphie par Pascal Blua et Stéphane Constant / Photographie © Dezzig

Depuis leurs débuts, le groupe australien The Apartments, emmené par le songwriter Peter Milton Walsh, est un trésor partagé par quelques milliers de personnes à peine.
Il l’est encore aujourd’hui, mais cela pourrait peut-être bien changer dans les mois à venir…